Éthique empirique et expérimentaleSciences et métaphysiqueune

L’éthique modélisée par la biologie et l’économie

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Christine Clavien – Département d’Ecologie et d’Evolution, Université de Lausanne, Unil-Sorge, Biophore, 1015 Lausanne, Suisse

Résumé Il est devenu courant d’intégrer des résultats de la biologie et de la théorie des jeux évolutionnaires (en particulier les résultats de Hamilton, Trivers et Axelrod) dans une réflexion éthique. Ce faisant, les auteurs acceptent de représenter certains aspects de nos pratiques morales à l’aide de modèles mathématiques. Par ailleurs, la modélisation mathématique est depuis longtemps utilisée par les économistes pour représenter les choix sociaux, voire moraux, d’agents rationnels. Un domaine de recherche émergeant concilie les deux approches en élaborant des modèles d’évolution des fonctions d’utilité qui gèrent le comportement social. Dans ces modèles, « Homo economicus » entre en compétition avec « Homo kantiensis » ou « Homo hamiltoniensis ». Cet article a pour objectif d’introduire les non-initiés à ce domaine de recherche et d’en comparer le potentiel explicatif par rapport aux modèles habituellement cités dans les écrits de philosophie morale.

Abstract : Many philosophers integrate concepts and results from and evolutionary biology (e.g. Hamilton, Trivers) and evolutionary game theory (e.g. Axelrod) in their ethical reflection. In doing so, the authors agree to represent certain aspects of human moral practices with mathematical models. Though less readily cited by moral philosophers, economists have a long tradition in modelling social and moral choices made by rational agents (e.g. Binmore). An emerging area of research combines the biological and the economical approaches by tracking the evolutionary stability of rational agents’ utility functions. In these models, utility functions such as « Homo economicus », « Homo kantiensis » or « Homo hamiltoniensis » compete against each other in evolutionary time. This article aims to introduce non-specialist readers to this area or research and to investigate whether models of social evolution applied to utility functions provide deeper insight into human moral decision-making than the models usually cited by moral philosophers.

1. Introduction

Bon nombre de philosophes s’inspirent de travaux de biologistes pour délimiter les contours et le contenu de la morale[1]. Parmi les biologistes les plus cités, William Hamilton a montré les effets des liens de parenté sur le comportement social[2], Robert Trivers a déterminé les conditions propices à l’émergence des mécanismes de réciprocité directe[3], John Maynard Smith et G. P. Price ont élaboré la notion de stratégie évolutionnairement stable[4], et Frans de Waal a fourni des indices de continuité entre le comportement social des primates et le comportement moral humain[5]. Il est intéressant de remarquer que parmi ces chercheurs, seul le dernier mène des études empiriques. Les autres ont développé des modèles mathématiques qui peuvent s’appliquer aux animaux non-humains[6], mais également à tout système qui remplit les conditions du modèle, y compris les robots[7] et les êtres humains[8]. Ainsi, si l’on s’inspire de Hamilton, Trivers ou Maynard Smith dans le cadre d’une réflexion sur la morale, il en découle une « éthique modélisée » plutôt qu’une « éthique empirique ».

Les biologistes n’ont pas le monopole de la modélisation du comportement social. Quoique moins volontiers cités par les philosophes de la morale, les économistes ont beaucoup étudié le comportement social humain. La théorie des jeux notamment formalise les choix des agents sociaux dans diverses situations d’interaction[9], y compris les interactions moralement pertinentes[10]. Une sous-branche de cette théorie, notamment représentée par le mathématicien Robert Axelrod, intègre des dynamiques évolutionnaires[11], établissant par là un lien direct entre les modèles classiquement développés en biologie et en économie.

Les modèles mathématiques (sur)simplifient la réalité de manière à mettre en valeur l’influence causale d’un ou de plusieurs facteurs dans des conditions bien définies[12]. Même s’ils ne fournissent jamais une description complète de la réalité, les modèles peuvent être utiles. Leur utilité dépend de leur capacité à éclairer un ou plusieurs aspects pertinents du phénomène étudié[13]. Il existe une multitude de modèles pour étudier le comportement social et leurs enseignements sont en principe complémentaires. Tous ces modèles représentent un environnement social dans lequel des agents interagissent et obtiennent des avantages ou des désavantages au terme de leurs interactions. Chaque modèle spécifie les caractéristiques de l’environnement social (e.g. les individus se rencontrent de manière aléatoire ou non, ont des interactions répétées ou non, forment des groupes ou non), les caractéristiques des agents (e.g. leurs facultés, leurs préférences, leurs stratégies comportementales) et les avantages ou désavantages obtenus par les agents au terme de leurs interactions possibles (e.g. gain monétaire, taux de reproduction). Toutes ces caractéristiques sont formalisées au moyen de fonctions et variables mathématiques. Cela posé, les modélisateurs observent dans quelles conditions (c’est-à-dire pour quelle valeur des différentes variables du modèle) les agents agissent de manière optimale. Par optimalité, il faut comprendre que le modèle a atteint une configuration de paramètres stable dans laquelle aucun agent ne gagnerait à modifier son comportement. Par ce biais, les modèles nous fournissent des indications sur la manière dont les vrais agents sont susceptibles d’interagir.

Source : Gratisography

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Dans la réalité, les êtres humains peuvent faire des choix optimaux par deux biais différents qui ne sont pas mutuellement exclusifs. Ils peuvent le faire parce qu’ils sont capables de déceler ce qui est optimal pour eux. Il s’agit de l’aspect rationnel du choix optimal. Les choix optimaux peuvent également être générés par un complexe de mécanismes psychologiques non réflexifs (e.g. désir sexuel, désir d’amasser des biens matériels, émotions de compassion envers ses proches, désir d’être entouré). Ces mécanismes se sont formés au cours d’un long processus de sélection naturelle parce qu’ils conféreraient à leur porteurs des avantages en termes de survie et de reproduction. Il s’agit de l’aspect intuitif du choix optimal. Certains modèles étudient l’aspect rationnel du choix (e.g. théorie des jeux classique) alors que d’autres en étudient l’aspect intuitif (e.g. modèles évolutionnaires classiques, théorie des jeux évolutionnaires). Dans cet article, nous nous intéressons à une famille de modèles qui se trouve à l’interface entre ces deux approches parce qu’ils traquent à la fois l’aspect rationnel et l’aspect intuitif de la prise de décision. Il s’agit des modèles d’évolution de fonctions d’utilité (ci-après « modèles EFU »). Encore peu connus en dehors d’un cercle d’initiés, les modèles EFU méritent que l’on y prête attention car ils semblent fournir des indications utiles pour comprendre le comportement social et moral humain. Dans ce qui suit, je présenterai le fonctionnement de ces modèles (sections 2-4). Ensuite, je détaillerai un résultat important obtenu de ce domaine de recherche : la stabilité évolutionnaire de la fonction d’utilité « Homo hamiltoniensis »[14] (section 5). Et pour terminer, je discuterai de la pertinence de ces modèles pour la philosophie morale en comparaison des modèles plus classiques (notamment ceux de Hamilton, Trivers ou Axelrod) régulièrement cités dans la littérature (sections 6-7).

2. Les modèles d’évolution sociale appliqués aux stratégies comportementales

Les modèles d’évolution sociale, initialement développés en biologie[15], puis utilisés en anthropologie[16], permettent de comprendre beaucoup de comportements sociaux tels que des phénomènes d’investissement parental ou d’investissement dans la construction de biens communs. Ces modèles comparent le succès évolutionnaire de stratégies comportementales héritables telles que « investis x unités d’énergie dans chacun des tes enfants », ou « investis x unités d’énergie dans la construction du bien commun ». Ces modèles fonctionnent de la manière suivante. Une population dite résidente composée d’individus de même type (c’est-à-dire possédant tous la même stratégie comportementale) est confrontée à l’invasion d’un mutant de type légèrement différent (e.g. « investis x–1 unités d’énergie dans chacun des tes enfants »). Si le mutant possède un avantage en termes de survie et de reproduction sur les individus résidents, il envahit la population et devient le nouveau type résident. Il sera à son tour confronté à l’invasion d’un nouveau mutant (e.g. « investis x–2 unités d’énergie dans chacun des tes enfants »). Lorsqu’un type résident ne peut être délogé par aucun mutant il est considéré comme évolutionnairement stable, c’est-à-dire optimal, et la procédure se termine.

Récemment, cette manière de modéliser l’évolution sociale a été utilisée pour tester la stabilité de fonctions d’utilité, au lieu des traditionnelles stratégies comportementales[17]. Pour comprendre la distinction entre fonction d’utilité et stratégie comportementale, une explication s’impose.

3. Les fonctions d’utilité

Les fonctions d’utilité ont été développées en économie pour formaliser la prise de décision d’agents rationnels. Un agent est dit rationnel lorsqu’il prend en compte tous les éléments dont il dispose et choisit toujours l’action qui lui permet de maximiser la satisfaction de ses préférences hiérarchiquement ordonnées. Ses préférences portent sur des biens ou états du monde qui sont à portée de son choix. Cela peut être formalisé à l’aide de fonctions d’utilité individuelles : chaque agent rationnel possède une fonction d’utilité qui est une représentation mathématique de toutes ses préférences hiérarchiquement ordonnées. A chaque fois qu’il a le choix entre plusieurs actions (e.g. investir plus ou moins dans sa progéniture, contribuer ou non au bien commun), il choisit l’option qui lui permet de maximiser la satisfaction de ses préférences, donc son « utilité » personnelle[18].

En théorie, il existe une variété infinie de fonctions d’utilité, mais les modélisateurs considèrent uniquement des fonctions qui leur permettent d’éclairer leur objet de recherche particulier. Par exemple, les modèles d’économie de marché intègrent en principe des fonctions d’utilité centrées sur la maximisation individuelle des bénéfices financiers ou matériels. Ce choix tient au fait que dans un contexte de marché économique, les consommateurs et les commerçants cherchent généralement à maximiser leurs gains financiers ou matériels. En revanche, lorsqu’il s’agit d’étudier les interactions sociales, les modélisateurs considèrent des fonctions d’utilité susceptibles de représenter de manière plus réaliste la personnalité sociale des agents. De ce fait, beaucoup de modélisateurs intègrent dans leurs fonctions d’utilité des préférences pro-sociales, c’est-à-dire des préférences pour le bien-être d’autrui ou pour le bien commun. Pour illustrer ce point, voici quelques exemples de fonctions d’utilité susceptibles de décrire les prises de décisions d’individus rationnels lors de leurs interactions sociales.

La fonction la plus simple qui n’intègre aucune préférence pro-sociale est habituellement labélisée « Homo economicus ». Elle contient une unique préférence pour le bien-être personnel. Par bien-être, il faut entendre une valeur objective et mesurable telle que le bien matériel ou le nombre d’enfants. Ainsi, « Homo economicus » est une fonction d’utilité orientée strictement vers soi-même et qui ignore complètement le bien-être d’autrui[19].

Par contraste, la classe des fonctions d’utilité dites « altruistes »[20] rend compte du fait que certains agents peuvent aussi se soucier du bien-être d’autrui. La plupart de ces fonctions intègrent une préférence pour le propre bien-être et une préférence pour le bien-être d’autrui, dont la valeur (i.e. le poids dans la hiérarchie des préférences) peut être plus ou moins grande. Par soucis de réalisme, le poids de la préférence altruiste est généralement inférieur à celui qui est accordé au propre bien-être. D’autres fonctions sont plus complexes. David Levine par exemple[21] intègre une préférence altruiste dont la valeur varie en fonction du type de partenaire d’interaction : si le partenaire est lui-même altruiste, l’agent sera enclin à la pro-socialité, mais si le partenaire n’est pas altruiste, alors l’agent favorisera également son intérêt propre.

D’autres fonctions d’utilité peuvent intégrer des préférences pour des valeurs morales. Par exemple la fonction « Aversion contre le manque d’équité »[22] contient une préférence générale pour l’équité de traitement ou la fonction « Homo kantiensis »[23] est composée d’une préférence inconditionnelle pour traiter tout le monde comme soi-même. Ces préférences sont pro-sociales sans être altruistes car elles n’intègrent pas un souci direct pour le bien-être des partenaires d’interaction.

Les fonctions d’utilité vues ci-dessus ont des caractéristiques différentes des stratégies comportementales habituellement utilisées dans les modèles évolutionnaires. Les stratégies comportementales sont des règles d’action immutables pour des contextes sociaux précis (e.g. la règle de coopérer dans une situation de dilemme du prisonnier[24]). Par contraste, les fonctions d’utilité contiennent des instructions générales (e.g. un certain degré de préférence pour son propre bien-être, pour celui des autres, ou pour le bien commun) pour qu’un agent rationnel puisse décider quelle stratégie comportementale utiliser dans n’importe quel type d’interaction sociale. Ainsi, de par son degré de généralité, une fonction d’utilité peut générer différentes stratégies comportementales dans différents contextes sociaux. Par exemple, dans un dilemme du prisonnier réitératif où les agents n’ont aucune connaissance sur leurs partenaires d’interaction, « Homo economicus » induit la stratégie « ne coopère jamais ». En revanche, si les agents connaissent les comportements passés de leurs partenaires d’interaction, « Homo economicus » induit un comportement coopératif envers certains types de partenaires, par exemple envers ceux qui punissent les non-coopérateurs et occasionnent à ces derniers un coût de punition supérieur au gain de la non-coopération.

4. Les modèles d’évolution sociale appliqués aux fonctions d’utilité (modèles EFU)

Supposons que les fonctions d’utilité représentent des ensembles de mécanismes psychologiques ou traits de caractère que les agents ne peuvent pas modifier au cours de leur vie et qui sont hérités (culturellement et/ou génétiquement) d’une génération à l’autre. Sous ces conditions, les fonctions d’utilité peuvent faire l’objet d’une sélection naturelle et prendre la place des traditionnelles stratégies comportementales dans des modèles d’évolution sociale.

La sélection des fonctions d’utilité procède de la manière suivante. Les fonctions d’utilité donnent des instructions générales aux agents et guident leurs choix dans différents contextes sociaux ; plus précisément, les agents analysent la situation et choisissent rationnellement la stratégie comportementale qui permet de maximiser leur fonction d’utilité individuelle. Ainsi, les fonctions d’utilité sont sélectionnées en fonction de leur effet global sur le bien-être des agents au terme de leur vie et de leurs interactions dans les diverses situations sociales rencontrées. Les fonctions d’utilité qui induisent, en général, les stratégies comportementales les plus avantageuses pour leurs porteurs sont sélectionnées. Lorsqu’une fonction d’utilité résidente ne peut plus être délogée par une fonction mutante, elle est considérée comme évolutionnairement stable, et donc optimale.

5. Un résultat de modèle EFU

Dans une recherche récente, les économistes Ingela Alger et Jörgen Weibull[25] ont analysé la stabilité évolutionnaire des fonctions d’utilité dans des contextes d’interactions entre deux joueurs. Une particularité de leur modèle EFU est l’inclusion d’une variable d’assortativité pour caractériser l’environnement social dans lequel interagissent les agents : cette variable d’assortativité indique la probabilité que les agents interagissent avec des partenaires de même type, c’est-à-dire possédant la même fonction d’utilité qu’eux-mêmes. Un haut degré d’assortativité, représente un environnement dans lequel les gens qui se ressemblent du point de vue de leurs préférences s’assemblent, et inversement lorsque le degré d’assortativité est bas. De plus dans leur modèle, les agents ont une connaissance limitée du type de leurs partenaires d’interactions : ils ne peuvent pas « voir » la fonction d’utilité de leur partenaire, en revanche ils connaissent le degré d’assortativité de leur environnement social, ce qui leur fournit une information sur la probabilité d’interaction avec un individu de même type qu’eux-mêmes. Ces deux conditions confèrent un certain réalisme au modèle car, dans certains contextes nous interagissons en priorité avec des gens qui partagent nos normes sociales (e.g. famille, cercles d’amis), alors que ce n’est pas forcément le cas dans d’autres contextes (e.g. milieux professionnels, lieux de vacances). De même, dans la réalité nous n’avons pas d’accès direct aux intentions et pensées des autres mais nous pouvons néanmoins former des suppositions basées sur des indices observables.

Dans le contexte social décrit ci-dessus, Alger et Weibull ont montré l’importance d’une fonction d’utilité qu’ils ont nommée « Homo hamiltoniensis ». Il s’agit d’une fonction à la fois pro-sociale et discriminative. Elle partitionne l’utilité de l’agent en deux composantes : une préférence pour son propre bien-être et une préférence pour appliquer la règle d’or, c’est-à-dire traiter tout le monde comme soi-même. Dans les faits, cette dernière revient à avoir une préférence pour le bien commun pour autant que tout le monde agisse de la même manière (et se partage donc le bien commun de manière équitable). Ces deux préférences sont pondérées par un facteur que Alger et Weibul appellent « degré de moralité » : plus la valeur de ce facteur est élevée, plus l’agent accorde du poids à sa préférence pro-sociale et inversement. De plus, chez « Homo hamiltoniensis » ce degré de moralité équivaut au degré d’assortativité de l’environnement social. En d’autre termes, plus la probabilité d’interagir avec un individu de son propre type est haute, plus « Homo hamiltoniensis » favorise la règle d’or, donc une forme de bien commun ; si cette probabilité est basse, le bien-être individuel est favorisé.

Alger et Weibull montrent que « Homo hamiltoniensis » est évolutionnairement plus stable que n’importe quelle autre fonction d’utilité, y compris « Homo economicus », « Aversion contre le manque d’équité » ou « Homo kantiensis ». Plus précisément, leur modèle montre que « Homo hamiltoniensis » ne peut être envahie par aucune fonction d’utilité mutante qui produit des stratégies comportementales différentes des stratégies générées par « Homo hamiltoniensis ».

6. Comparaison avec les modèles de Hamilton, Trivers et Axelrod

Le modèle de Alger et Weibull nous indique que les préférences pro-sociales sont sélectionnées dans des environnements où ceux qui se ressemblent s’assemblent. Ce résultat n’est pas complètement nouveau. Hamilton[26] l’avait déjà montré pour les comportements d’aide héritables. Plus précisément, Hamilton a développé une règle fameuse, selon laquelle, pour qu’un trait social héritable (e.g. un comportement d’aide, un comportement opportuniste, un comportement hostile) puisse être sélectionné, il doit réaliser la condition suivante : c < rb, où (c) désigne le coût pour l’acteur engendré par le trait social, (b) désigne le bénéfice pour le partenaire d’interaction généré par le trait social, et (r) désigne le degré d’assortativité, c’est-à-dire la probabilité que le partenaire d’interaction partage le trait social de l’acteur[27]. Ainsi, pour qu’un comportement d’aide couteux pour l’acteur puisse être sélectionné, il doit bénéficier prioritairement à des individus qui ressemblent à l’acteur[28].

Un autre résultat classique, complémentaire à celui de Hamilton, a été développé par Robert Trivers[29]. A l’aide d’un modèle d’évolution sociale, Trivers a étudié les conditions de stabilisation évolutionnaire de l’« altruiste réciproque », c’est-à-dire des comportements généreux mais uniquement envers des individus qui rendent la pareille (quelle que soit la raison pour laquelle ils le font : par générosité, par peur d’être puni, etc.). Trivers a montré que l’altruisme réciproque peut être adapté quand les individus interagissent de manière répétée dans des petits groupes et lorsqu’ils sont exposés de manière plus ou moins symétrique à des situations d’entraide. Ce résultat a ensuite été répliqué et précisé à l’aide de modèles de théorie des jeux évolutionnaires[30].

Supposons que les résultats des modèles susmentionnés véhiculent des informations générales correctes sur les conditions d’évolution du comportement et des préférences sociales humaines. C’est le parti pris par tous les philosophes de la morale qui s’inspirent des travaux de Hamilton, Trivers ou Axelrod. Cependant, à certains égards, ces résultats semblent problématiques. D’un côté, ils ont une portée extrêmement (voire trop) générale. En effet, les modèles classiques d’évolution sociale (e.g. Hamilton, Trivers) et les modèles de théorie des jeux évolutionnaires (e.g. Axelrod) s’appliquent à tous les organismes qui suivent de manière systématique des règles de comportement et qui transmettent ces règles à la génération suivante par voie d’hérédité. Ainsi, ces modèles s’appliquent aux êtres humains de même qu’aux animaux, voire même aux robots (du moins ceux qui sont dotés d’un code génétique et d’un réseau de neurones virtuels). D’un autre côté, ces mêmes modèles reposent sur des postulats empiriques difficilement applicables à l’homme. En particulier, ils postulent que les individus appliquent toujours spontanément et sans réfléchir, les règles de comportement qu’ils ont héritées. Or on sait bien que les choix humains ne sont pas complètement déterminés ; l’analyse rationnelle des situations sociales fait partie intégrante de nos prises de décision.

De plus dans le domaine de la philosophie morale, on s’intéresse davantage aux intentions et motifs des agents qu’à leurs comportements observables. Or les modèles classiques de Hamilton, Trivers ou Axelrod portent sur l’évolution de stratégies comportementales locales, c’est-à-dire des règles d’action spécifiques pour des contextes sociaux particuliers (par exemple la règle de coopérer dans une situation de dilemme du prisonnier). De par leur focale sur les comportements, ils fournissent des informations assez indirectes sur les mécanismes psychologiques sous-jacents aux prises de décision.

Il y a donc des aspects insatisfaisants chez les modèles classiques d’évolution sociale et les modèles de théorie des jeux évolutionnaires. Du point de vue du théoricien intéressé par l’explication de la moralité humaine, on ne peut s’empêcher de souhaiter des modèles qui s’appliquent plus spécifiquement à la prise de décision humaine. Ces modèles devraient rendre compte des motivations des agents et pas uniquement de leur comportement. De plus, ces modèles devraient intégrer un processus de décision plus rationnel.

Il se trouve que les modèles EFU remplissent précisément ces deux critères. Dans ces modèles, les agents évaluent chaque nouvelle situation et font des choix rationnels en fonction des préférences générales qu’ils ont héritées. Ils n’ont pas eux-mêmes de prise sur leurs préférences; en quelque sorte, ce sont leurs traits de caractères hérités de leurs parents qu’ils ne peuvent pas modifier au cours de leur existence. Ce duo de « préférences générales héritées » et de « capacité d’évaluation rationnelle » permet aux agents de traiter n’importe quelle situation qu’ils rencontrent et d’adapter leurs choix individuels de manière à satisfaire leurs préférences. Grâce à cette procédure de décision, il n’est pas nécessaire de postuler que l’être humain hérite d’une foultitude de règles de comportement locales, chacune étant adaptée à un type de situation sociale qu’un individu pourrait rencontrer dans sa vie.

De plus les modèles EFU permettent de rendre compte des situations dans lesquelles un agent agit selon ses préférences (i.e. il maximise son utilité individuelle) sans pour autant maximiser son bien-être objectif. Cela peut arriver si l’acteur possède une préférence pro-sociale, c’est-à-dire une préférence pour négliger son propre bien-être au profit d’un impératif moral ou au profit du bien-être de son partenaire d’interaction.

7. Interprétation psychologique de « Homo hamiltoniensis »

Nous avons vu que les modèles EFU semblent particulièrement pertinents pour rendre compte de la psychologie humaine et qu’un résultat important dans ce domaine de recherche[31] met en valeur la stabilité évolutionnaire de la fonction d’utilité « Homo hamiltoniensis ». Supposons donc que cette fonction d’utilité a été sélectionnée au cours de notre passé évolutionnaire et qu’elle est largement répandue dans la population humaine. Tout en gardant à l’esprit qu’il s’agit là d’une affirmation extrêmement hypothétique qui reste à confirmer empiriquement, on peut se demander quels mécanismes psychologiques pourraient sous-tendre les préférences contenues dans « Homo hamiltoniensis ». En d’autres termes, il s’agit de se demander comment cette fonction d’utilité pourrait se réaliser dans la psychologie humaine.

Pour rappel, « Homo hamiltoniensis » présente à la fois une motivation (préférence) à promouvoir son propre intérêt et une motivation à agir en faveur de la règle d’or ou d’une forme de bien commun équitablement partagé. Cette dernière contrebalance la première et se manifeste en proportion du degré d’assortativité de l’environnement social, c’est-à-dire de la probabilité d’interagir avec des individus motivés à agir comme soi-même.

Considérons d’abord la première composante de « Homo hamiltoniensis », soit la préférence pour son propre bien-être. Nous avons vu que le bien-être réfère à une valeur objective et mesurable. Dans les modèles évolutionnaires, elle correspond à la valeur de survie et de reproduction (i.e. nombre de descendants viables) de l’individu. Ainsi, tout état de fait qui corrèle fortement avec la survie et la reproduction de l’individu fait partie de son bien-être objectif : amasser des gains économiques, avoir un partenaire romantique, avoir des enfants sains, entretenir des relations d’entre-aide sur le long terme, etc. Il s’ensuit que la préférence pour son propre bien-être peut être générée par un ensemble complexe de mécanismes psychologiques incluant une attirance pour les gains économiques, une capacité à ressentir de l’amour envers son partenaire sexuel et envers ses propres enfants et une tendance à valoriser les amitiés d’entre-aide.

Considérons maintenant la seconde composante de « Homo hamiltoniensis », soit la préférence conditionnelle pour la règle d’or ou le bien commun. Plusieurs interprétations sont possibles mais voici la plus probable[32]. Les humains pourraient avoir développé des compétences particulières pour évaluer la probabilité générale d’interagir avec des personnes ayant des préférences sociales similaires. Leur évaluation grossière de cette probabilité influence le poids qu’ils accordent à leur préférence pour suivre la règle d’or ou favoriser le bien commun : plus précisément, s’ils estiment que leurs partenaires d’interactions leur ressemblent (du point de vue des préférences sociales), ils agissent de manière pro-sociale, et inversement. Au niveau de la psychologie humaine, ce choix conditionnel peut être réalisé de différentes manières. Il pourrait être causé par un calcul rationnel: l’acteur comprend que lorsqu’il interagit régulièrement avec des partenaires qui lui ressemblent, il peut augmenter son propre bien-être en traitant ses partenaires comme il aimerait être traité lui-même ou en contribuant au bien commun. Alternativement, le comportement pro-social peut être causé par des mécanismes non-réflexifs, comme une tendance à faire confiance à des personnes qui partagent nos propres normes sociales, ou une tendance à s’engager dans des projets collectifs avec ces personnes, une aspiration à contribuer au bien commun lors d’interactions avec ces personnes, ou une tendance à vouloir suivre la règle d’or en présence de ces personnes.

D’autre part, rappelons que « Homo hamiltoniensis » supplante toutes les autres fonctions d’utilité, y compris “Homo economicus”, qui valorise uniquement le propre bien-être, et les fonctions altruistes. Ces dernières contiennent une préférence pour le bien-être du partenaire d’interaction. Or, les mécanismes psychologiques susceptibles de produire des préférences altruistes dans toutes les interactions sociales que pourraient rencontrer les êtres humains sont très probablement des mécanismes altruistes au sens psychologique du terme : parmi ces mécanismes, on pourrait compter les sentiments empathiques non discriminatoires envers tous les partenaires d’interactions ou une volonté inconditionnelle d’aider autrui.

Ainsi, sous l’hypothèse que « Homo hamiltoniensis » est largement répandue dans la population humaine au détriment d’autres fonctions d’utilité (ce qui n’est pas certain et requiert des confirmations empiriques), nous pouvons avancer les deux prédictions suivantes. Premièrement les êtres humains ne valorisent pas uniquement leur propre bien-être. Ils ont, profondément ancrées en eux, des préoccupations pour la règle d’or, le bien commun ou une tendance à s’engager dans des projets collectifs. Cependant, ces préoccupations se manifestent de manière discriminatoire et ont probablement co-évolué avec la capacité de détecter la probabilité d’interagir avec des personnes ayant des préférences similaires. Deuxièmement, puisque les fonctions d’utilité altruistes manquent de stabilité évolutionnaire, les êtres humains montrent peu de motivation psychologique altruiste, sauf envers les individus qui favorisent leur bien-être objectif. Ainsi, les partenaires romantiques, les propres enfants, et les partenaires d’entraide sur le long terme sont les bénéficiaires les plus probables des actions altruistes.

Le lecteur familier avec la littérature sur l’altruisme[33] sera intéressé par ce résultat. En effet, on serait tenté de croire que la sélection de comportements altruistes au sens biologique du terme (c’est-à-dire les comportements qui favorisent la survie et la reproduction d’autres individus au détriment de la survie et de la reproduction de l’acteur) est concomitante avec la sélection de motivations altruistes, au sens psychologique du terme (c’est-à-dire la motivation intrinsèque à aider son partenaire d’interaction). Or, le résultat de Alger et Weibull semble plutôt indiquer que les comportements altruistes biologiques (par exemple en faveur d’amis, de cousins, etc.) sont concomitants avec l’évolution de préoccupations pour la règle d’or, le bien commun ou de tendances à s’engager dans des projets collectifs. Or ces mécanismes ne comptent pas comme altruistes, au sens psychologique du terme, parce qu’ils ne sont pas dirigés vers des individus particuliers. Quant aux mécanismes psychologiques altruistes, ils semblent plutôt avoir évolué pour assurer le soin d’individus qui contribuaient en retour à la réalisation du bien-être de l’acteur (i.e. partenaires romantiques, enfants).

8. Conclusion

Dans cet article, j’ai tenté de montrer la pertinence des modèles d’évolution de fonctions d’utilité pour une compréhension descriptive de la motivation morale humaine. Pour illustrer mon propos, j’ai proposé une interprétation empirique de la fonction d’utilité « Homo hamiltoniensis » qui est évolutionnairement stable dans le modèle d’Alger et Weibull. Il importe cependant de noter que ce résultat n’invalide pas la règle de Hamilton ou les travaux de Trivers et Axelrod sur l’altruisme réciproque, souvent cités par les philosophes de la morale. Dans la mesure où ils sont élaborés selon les règles de l’art, tous les modèles sur le comportement social sont complémentaires. En additionnant leurs résultats, il est possible de construire graduellement une compréhension plus complète des mécanismes qui régulent les interactions sociales en général et morales en particulier.


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[11] Robert M. Axelrod, The evolution of cooperation (New York: Basic Books, 1984); Maynard Smith et Price, « Logic of Animal Conflict », Op. Cit.

[12] U. Mäki, « The truth of false idealizations in modelling », in Models, Simulations, and Representation, éd. par P. Humphreys (London: Routledge, 2011).

[13] Harold Kincaid et Don Ross, The Oxford handbook of philosophy of economics (Oxford ; New York: Oxford University Press, 2009); Itzhak Gilboa et al., « Economic models as analogies », The Economic Journal 124, no 578 (1 août 2014): F513‑33.

[14] Ingela Alger et Jörgen W. Weibull, « Homo moralis—Preference evolution under incomplete information and assortative matching », Econometrica 81, no 6 (1 novembre 2013): 2269‑2302.

[15] N. Davies, J. R. Krebs, et S. West, An introduction to behavioral ecology (Oxford: Wiley-Blackwell, 2012).

[16] L. L. Cavalli-Sforza et Marcus W. Feldman, Cultural transmission and evolution : a quantitative approach, Monographs in population biology : 16 (Princeton, N.J.: Princeton University Press, 1981); Richard MacElreath et Robert Boyd, Mathematical models of social evolution : a guide for the perplexed (Chicago: The Univ. of Chicago Press, 2007).

[17] W. Güth et M. Yaari, « An evolutionary approach to explain reciprocal behavior in a simple strategic game », in Explaining process and change — Approaches to evolutionary economics, éd. par U. Witt (Ann Arbor: University of Michigan Press, 1992); S. Huck et J. Oechssler, « The indirect evolutionary approach to explaining fair allocations », Games and Economic Behavior 28 (juillet 1999): 13‑24; Erol Akçay et al., « A theory for the evolution of other-regard integrating proximate and ultimate perspectives », Proceedings of the National Academy of Sciences 106 (10 novembre 2009): 19061‑66; Ingela Alger et Jörgen W. Weibull, « A generalization of Hamilton’s rule—Love others how much? », Journal of Theoretical Biology 299 (2012): 42‑54; Thomas Grund, Christian Waloszek, et Dirk Helbing, « How natural selection can create both self- and other-regarding preferences, and networked minds », Scientific Reports 3 (19 mars 2013); Alger et Weibull, « Homo moralis », Op. Cit.

[18] Gebhard Kirchgässner, Homo oeconomicus: the economic model of behaviour and its applications in economics and other social sciences (New York: Springer, 2008).

[19] Jörgen W. Weibull, Evolutionary game theory (Cambridge, Mass.: MIT Press, 1995).

[20] Gary S. Becker, The economic approach to human behavior (Chicago: University of Chicago Press, 1976); Ulrich Mayr, William T. Harbaugh, et Dharol Tankersley, « Neuroeconomics of charitable giving and philantropy », in Neuroeconomics : decision making and the brain, éd. par Paul W. Glimcher et al. (Amsterdam ; Boston: Elsevier Academic Press, 2009), 303‑20; Akçay et al., « A theory for the evolution of other-regard integrating proximate and ultimate perspectives », Op. Cit .

[21] David K. Levine, « Modeling altruism and spitefulness in experiments », Review of Economic Dynamics 1 (1998): 593‑622.

[22] Ernst Fehr et Klaus M. Schmidt, « A theory of fairness, competition, and cooperation », Quarterly Journal of Economics 114 (1999): 817‑68.

[23] Alger et Weibull, « Homo moralis », Op. Cit.

[24] Dans un dilemme du prisonnier à deux agents, chaque agent doit choisir entre coopérer ou faire défection sans savoir quel sera le choix de son partenaire. La matrice des gains et bénéfices est telle que la coopération mutuelle génère plus de bénéfices que la défection mutuelle alors qu’une défection unilatérale génère un gain maximal pour celui qui fait défection et une perte maximale pour celui qui coopère. Dans une telle situation sociale, les deux agents ont intérêt à faire défection alors qu’ils s’en sortiraient mieux en coopérant tous les deux.

[25] Alger et Weibull, « Homo Moralis », Op. Cit.

[26] Hamilton, « Selfish and spiteful behaviour in an evolutionary model »; « The genetical evolution of social behaviour », Op. Cit.

[27] Ces trois facteurs (c, b et r) peuvent être positifs ou négatifs, ce qui permet à la règle de Hamilton de couvrir tous les types de comportements sociaux possibles, qu’ils soient altruistes, coopératifs, hostiles, ou égoïstes.

[28] Sans vouloir entrer dans les détails, mentionnons que d’un point de vue mathématique, le résultat de Hamilton est plus fondamental que celui de Alger et Weibull. En fait, la fonction d’utilité « Homo hamiltoniensis » est une règle de décision générale qui mène de manière fiable les individus à choisir des stratégies comportementales qui satisfont la règle de Hamilton. C’est la raison pour laquelle  « Homo hamiltoniensis » est évolutionnairement stable. Malgré cette relation de dépendance mathématique, nous verrons que le résultat du modèle de Alger et Weibull n’en est pas moins pertinent pour éclairer le comportement moral humain.

[29] Trivers, « The evolution of reciprocal altruism », Op. Cit.

[30] Binmore, Natural justice; Axelrod, The evolution of cooperation, Op. Cit.

[31] Alger et Weibull, « Homo moralis », Op. Cit.

[32] Pour une analyse plus détaillée, voir Christine Clavien et Michel Chapuisat, « The evolution of utility functions and psychological altruism », soumis.

[33] A ce propos, voire Christine Clavien, Je t’aide moi non plus: biologique, comportemental ou psychologique, l’altruisme dans tous ses états (Paris: Vuibert, 2010).

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