Perspectives

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Par Eve Suzanne.

Paul Ricœur résume parfaitement le problème auquel nous sommes confrontés avec les neurosciences : « Ma thèse initiale est que les discours tenus d’un côté et de l’autre relèvent de deux perspectives hétérogènes, c’est-à-dire non réductibles l’une à l’autre et non dérivables l’une de l’autre. Dans un discours, il est question de neurones, de connexions neuronales, de système neuronal, dans l’autre, on parle de connaissance, d’action, de sentiment, c’est-à-dire d’actes ou d’états caractérisés par des intentions, des motivations, des valeurs »[1]. Si Ricœur se situe ici au niveau d’un dualisme sémantique, cette problématique vaut aussi pour le dualisme des substances. Les neurosciences considèrent qu’elles sont parvenues à combler le fossé entre le fait biologique (neurones …) et le fait psychique (sentiment …). Elles ont besoin pour asseoir leur prétention de ce présupposé puisque la neurobiologie se donne comme objectif d’expliquer les conditions même de l’émergence de l’idée scientifique. Auparavant, la science se préoccupait uniquement de produire des théories, des connaissances suivant le domaine dans lequel elle s’exerçait et pas de ce qui la produisait elle-même, d’où venaient les théories scientifiques.

Grâce à la plasticité synaptique, on peut entrevoir la possibilité pour les neurosciences de dépasser leur aversion vis-à-vis de toute forme de dualisme et atténuer leur position réductionniste. En effet, le fonctionnement du cerveau relève à la fois de processus cérébraux identiques pour tous et en même temps de variations au niveau de nos synapses en lien direct avec notre environnement.

L’Homme psychique et l’Homme neuronal, loin d’être ennemis, sont tout deux indispensables pour penser l’Homme dans sa globalité.

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Bibliographie

Définitions des termes qui relèvent du domaine des neurosciences :

Neurosciences : il s’agit de l’ensemble des disciplines scientifiques, particulièrement la biologie, dont l’étude porte sur l’organe le plus complexe du corps humain : le cerveau, c’est-à-dire le système nerveux avec une centaine de milliards de neurones et plus d’un million de milliards de connexions synaptiques.

Neurobiologie : une branche, parmi d’autres au sein des neurosciences moléculaires et cellulaires qui s’est spécialisée dans l’étude des phénomènes biologiques au sein du système nerveux ; c’est-à-dire qu’elle met au jour, au moyen de la biologie moléculaire, les constituants chimiques des neurones et permet de dégager les lois qui gouvernent la communication entre les neurones (à l’aide des neurotransmetteurs) et entre les différentes aires du cerveau.

neuroneNeurone : c’est une cellule nerveuse, et plus précisément, l’unité cellulaire de base dont se compose le cerveau.

Synapse : il s’agit du lieu de contact entre deux neurones, situé aux terminaisons de l’axone, où les neurotransmetteurs, en tant que médiateurs qui permettent la transmission de l’influx nerveux, se propagent d’une synapse à l’autre, c’est-à-dire où l’information se transmet d’un neurone à l’autre dans le système nerveux.

Plasticité cérébrale (= neuronale =synaptique) : capacité pour le cerveau à s’adapter et/ou à se reconstituer dans le cas de son développement ou dans les cas extrêmes d’accidents et de maladies.


[1] P. Ricœur et J.P. Changeux, « Ce qui nous fait penser », La Nature et la Règle, Paris, Odile Jacob, 2000, p.23.

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