Les frontières de la sécurité

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La notion de sécurité en théorie des relations internationales.

Lorsque les relations internationales accèdent au rang de « discipline » enseignée à l’Université, après la Première Guerre mondiale, elles sont totalement imprégnées par l’histoire politique européenne et déterminées par le contexte militaire mondial d’alors. La sécurité va très rapidement occuper une place centrale parmi les objets d’études fondant la discipline. Portée par l’approche réaliste, paradigme dominant et structurant de la discipline, la question de la sécurité de l’État va constituer l’un des principes et l’une des problématiques sur lesquels la discipline va se constituer.

Dans ce courant de pensée, l’État souverain, territorialisé et enserré dans des frontières strictes, est à la fois l’acteur central des relations internationales et le sujet de la scène internationale dont il convient d’assurer la sécurité. Celle-ci se définit comme sécurité extérieure, entendue comme la sécurité du territoire de l’État face aux menaces que constituent les autres acteurs étatiques composant le système international. En effet, évoluant dans un espace supposé anarchique, où la politique interne se distingue de la politique internationale, les États seraient en concurrence les uns avec les autres et seraient plongés dans un état d’insécurité permanente du fait des incertitudes entourant les ambitions, les attitudes, voire les velléités de puissance, des autres États. Dans ce dilemme de la sécurité, qui verrait les États préparer leur défense en conséquence, renforçant les incertitudes perçues par les autres acteurs et alimentant d’autant la spirale de l’insécurité, la logique du conflit est omniprésente et se combine avec le primat de la dimension militaire de la menace.

Hégémonique durant une grande partie du XXe siècle, le paradigme réaliste va contribuer à imposer une définition restrictive et réductrice du champ sécuritaire dans le domaine des relations internationales. Avec le paradigme réaliste, les frontières de la sécurité se confondent alors avec la sécurité des frontières de l’État.

Malgré des premières brèches intervenues dans l’édifice réaliste dès les années 1950, avec la notion de « communauté de sécurité » développée par le sociologue Karl Deutsch[1], il faudra attendre les années 1980-1990 pour voir émerger des approches véritablement critiques s’attaquant aux prémices réalistes et à leur réductionnisme sécuritaire. Sous l’influence des pensées ou des philosophes  poststructuralistes ,  postmodernes ,  constructivistes  ou encore  féministes , ces analyses vont ainsi tenter de redéfinir les frontières de la sécurité, en élargissant le domaine de la sécurité et en interrogeant les sujets de la sécurité, c’est-à-dire les sujets dont la sécurité devra être assurée, tandis que d’autres travaux tenteront, pour leur part, dans les années 1990, d’interroger les processus sociaux et les dispositifs de savoir qui contribuent à la construction des objets de la sécurité (nature de la menace, construction de l’ennemi, etc.).

L’évolution de la notion de sécurité dans le champ des théories des relations internationales nous mène ainsi de la sécurité entendue uniquement comme sécurité de l’État à la notion de sécurité humaine, mettant l’accent sur l’individu. Remis en cause dans certains de ses fondements, le discours réaliste de la sécurité n’a pas disparu pour autant. Bien au contraire, il continue à structurer le champ ; toujours prompte à être mobilisé lorsque, face à l’incertitude de l’événement international, c’est la pensée elle-même qui se trouve en état d’insécurité et suggère le retour des discours les plus traditionnels, parce que les plus rassurant, fussent-ils inadaptés à la réalité qu’ils entendent couvrir. C’est ce qu’indique le bref survol de l’histoire de la notion de sécurité que nous entendons développer ici.

Élargissement et approfondissement du concept de sécurité. L’inspiration de l’école de Copenhague.

Ces différentes approches critiques de la sécurité, que l’on regroupe sous la catégorie de post-positiviste, sans constituer un ensemble homogène, vont néanmoins se retrouver autour de quelques traits communs. Et en premier lieu le rejet des fondements du paradigme réaliste et sa vision étatique et monolithique de la sécurité.

A partir des années 1980, sous la houlette de ce que l’on connaît aujourd’hui sous le nom de l’école de Copenhague en relations internationales, l’agenda de recherche en matière d’études de sécurité va s’en trouver largement redéfini[2]. Dès 1983, le politologue danois Barry Buzan, dans son travail, People, States and Fear[3], propose de revisiter le champ de la sécurité. Sans réussir, malgré tout, à se défaire totalement des principes réalistes, l’apport de l’école de Copenhague va consister, principalement, à formaliser l’idée que la sécurité militaire n’est pas le seul type d’enjeux sécuritaires auxquels un État doit faire face. B. Buzan va ainsi opérer une sectorisation des enjeux de sécurité, qui le  conduit à construire une typologie des enjeux sécuritaires en cinq volets. Outre la sécurité militaire, il faudrait également envisager la sécurité politique, qui concerne la stabilité institutionnelle de l’État et de son régime politique ; la sécurité économique, qui concerne les conditions de maintien du bien-être et de la prospérité d’un État ; la sécurité environnementale, comme protection des conditions de la vie humaine sur terre ; la sécurité sociétale enfin, qui porte principalement sur les atteintes à la culture et la langue d’une entité politique, son identité en somme.

Dans ce dispositif d’analyse, l’extension du domaine de la sécurité correspondrait à l’apparition de « nouvelles menaces », objectivement repérables, auxquels les États occidentaux devaient faire face. Tout en élargissant le domaine de la sécurité, B. Buzan n’élargissait pas, pour autant, la sphère des sujets à sécuriser, et il n’interrogeait pas, non plus, les processus par lesquels se construisaient les fameuses « nouvelles menaces » auquel l’État devait répondre, ni les mécanismes par lesquels se produisaient de la sécurité. Tout en amendant quelque peu ses analyses dans une réédition de son ouvrage en 1991, le chercheur ne s’est pas réellement départi de l’idée qu’il se faisait du rapport entre menace et sécurité.

Ces travaux, qui persistent malgré tout à accorder à l’État un rôle central comme sujet principal de la sécurité, vont être repris et prolongés, quelque temps plus tard, par Ole Waever, autre animateur de cette école de Copenhague, fortement influencé, pour sa part, par les perspectives « poststructuraliste » et « postmoderne » (de Michel Foucault à Jacques Derrida). Rompant quelque peu avec la typologie en cinq catégories de Buzan, il réduira cet ensemble sécuritaire à deux catégories : la sécurité de l’État et la sécurité sociétale. Il va ainsi s’attacher, en insistant sur le concept de sécurité sociétale, entendu comme la survie identitaire d’une société ou d’une communauté, à tenter de s’affranchir encore un peu plus de la centralité de l’État comme sujet de la sécurité. Ole Waever définit la sécurité sociétale comme « la capacité d’une société à persister dans ses caractéristiques essentielles face aux conditions changeantes et face à des menaces probables ou réelles »[4]. Plus que l’État donc, c’est la société qui apparaît, à ses yeux, comme devant faire l’objet d’une sécurisation. Peu à peu ce thème du processus de sécurisation va devenir un élément majeur dans l’analyse de Waever, qui va s’appuyer sur des analyses en termes de discours et sur le rôle du langage dans la construction de la réalité de la menace. Pour le politologue français Didier Bigo, directeur de la revue Cultures et conflits,

selon [Waever], un problème devient un problème de sécurité, non quand on constate une augmentation des conflits et des risques attenants pour un État donné, mais quand les agents sociaux l’appellent problème de sécurité afin de pouvoir lui appliquer certaines règles, certaines modalités qu’ils ne pourraient pas appliquer autrement. L’intérêt de l’approche nouvelle de Waever est de bien montrer le rôle clé de la labellisation comme forme de pouvoir symbolique et la capacité de certains acteurs de nommer ainsi certains problèmes de sécurité. Ce faisant les agents transforment la nature du problème et par là les possibilités de le résoudre. [5]

Pour l’école de Copenhague,

la mondialisation contemporaine affecte moins les États qui voient leurs fonctions changer sans que leur souveraineté ne soit mise en cause, que les sociétés, dont l’identité est menacée par tout un ensemble de processus allant des flux migratoires à l’importation massive de biens culturels étrangers en passant par la prise de contrôle de richesses nationales par des intérêts extérieurs et l’intégration dans des entités plus vastes. Exprimé autrement, la notion de sécurité sociétale, synonyme de survie identitaire, renvoie au “nous” qui se reproduit en se distinguant des “autres” : tout ce qui constitue une menace existentielle à la survie de ce “nous”, qu’il s’agisse d’une nation, d’une ethnie, d’une communauté religieuse, est potentiellement une question sécuritaire. [6]

Comme le reconnaissent les tenants de l’école de Copenhague, une telle position scientifique n’est pas sans risque quant à la reconduction possible, à travers leurs discours, d’une vision fermée de la communauté en question et d’un repli identitaire. On peut lire ainsi, sous la plume de plusieurs représentants de cette école : « La sécurité sociétale ne peut éviter le risque de légitimer une politique de sécurité privée (non-étatique). Accepter le fait que d’autres voix parlent au nom de la société impliquera toujours une délégitimation de l’État qui « devrait » être le protecteur de la société. Ce fait devient un problème dès lors que quiconque tente de parler en son nom. La proximité avec l’idéologie fasciste est troublante : devrait-on alors déconseiller la mise en œuvre d’une problématique de la sécurité sociétale ? Ne courons-nous pas le risque de légitimer avec ce concept des réactions nationalistes et xénophobes contre l’étranger ou contre l’intégration ? Nous défendons quant à nous notre terme de sécurité sociétale ! Ce peut être un risque, mais il nous semble que c’est un risque que nous devons courir. Ce danger doit s’effacer devant la nécessité d’utiliser le concept de sécurité sociétale pour tenter de comprendre le phénomène qui est en cours »[7]. Ce que le politologue Jeff Huysmans appellera le dilemme normatif des études de sécurité. « Comment écrire ou dire la sécurité, s’interroge le chercheur, quand un savoir sécuritaire risque de produire ce que l’on cherche à éviter, et ce que d’aucuns critiquent : la sécurisation de l’immigration, des drogues, etc. »[8]

Le temps des Critical security studies

Ce qui se dessine, en creux, dans les travaux initiaux de l’école de Copenhague, et que l’on va retrouver dans les approches critiques de la sécurité qui se développent dans les années 1990, c’est une conception de la sécurité dans laquelle la sécurité et les menaces ne doivent pas se réduire à des réalités objectives qui existeraient en soi et a priori. Elles sont, au contraire, le fruit d’un processus de construction et de transformation sociales. En cela, les analyses critiques et constructivistes développées dans le courant des années 1990 ne vont faire qu’approfondir le mouvement d’élargissement du concept de sécurité à d’autres secteurs, tout en rompant définitivement avec le stato-centrisme. Ces approches critiques de la sécurité, qui demeurent par ailleurs hétérogènes entre elles, vont cependant avoir pour point commun de chercher à désessentialiser la sécurité, certaines mettant l’accent sur la nécessité de prendre en compte les effets de langage dans une telle construction (Ole Waever), d’autres décidant de se focaliser sur la dimension politique de la sécurité (David Campbell[9], etc.) ou s’inspirant de la théorie critique de l’École de Francfort pour tenter de repenser la sécurité dans une perspective d’émancipation (Ken Booth)[10].

En France, c’est autour de Didier Bigo et de la revue Cultures et conflits que se sont développées les études critiques de sécurité, dans une veine davantage sociologique souvent et en accordant une place centrale aux agents et aux dispositifs sociaux de la sécurité. D. Bigo s’est ainsi attaché à montrer, dès les années 1990, à travers ce qu’il appelle le continuum sécuritaire notamment, l’immixtion de l’« extérieur » dans le champ de la sécurité intérieure, et donc l’interpénétration de la sécurité intérieure et de la sécurité extérieure. Il critique, au passage, l’idée que cette interpénétration ne serait le fait que de l’apparition de nouvelles menaces produites par la « fin des frontières » et le transnationalisme. Il faut, selon lui, tenir compte des acteurs sociaux qui font la sécurité :

La délimitation des domaines de la sécurité intérieure et de la sécurité extérieure est déstabilisée. On évoque le changement de contexte international. On élargit la conception de la sécurité pour en tenir compte. On évoque la globalisation économique avec sans doute plus de crédibilité. Inversement, on parle de la construction du consensus par les médias et du complot américain. Mais s’il y a stratégisation de la sécurité intérieure et si celle-ci devient chaque jour plus prégnante ce n’est pas parce qu’elle correspond à la réalité, à la volonté de l’opinion publique ou à un complot des “gros”. C’est parce qu’elle s’impose comme “programme de vérité” sur la sécurité. L’interpénétration de la sécurité intérieure et de la sécurité extérieure ne correspond en rien à une augmentation des menaces à l’époque contemporaine : elle est un abaissement du seuil d’acceptabilité de l’autre, une forme d’insécurisation du quotidien par les professionnels de la sécurité et une montée en force des logiques d’action policière. A cet égard, on constate un double mouvement. Qu’il s’agisse de l’agression soviétique ou de l’incivilité des enfants, certains imaginent un même programme de sécurité, les mêmes solutions coercitives et une militarisation du sociétal. Cependant, ils ont beau proclamer que les périls augmentent, que des solutions énergiques doivent s’appliquer, que les militaires peuvent et doivent y participer, en pratique, il s’agit davantage de policiarisation du militaire. Ce sont les militaires qui, en Bosnie, effectuent des opérations de police internationale et demandent conseil aux gendarmes pour maintenir l’ordre sans “dégénérer dans la guerre”. Les échauffourées des banlieues deviennent terrain d’entraînement pour les crises internationales, les moyens mis en œuvre à l’intérieur comme à l’extérieur sont conçus, à l’échelle européenne, comme des techniques proactives de polices. [11]

Si la démarche adoptée dans le cadre de l’ensemble de ces travaux critiques accorde une grande place à la dimension réflexive, la dimension empirique n’est pas pour autant abandonnée, malgré le caractère inégal de ces productions. A cet égard, l’épisode de la guerre froide ou la question du terrorisme aujourd’hui offrent de multiples cas d’étude, comme autant de manière de déconstruire les fondements du paradigme réaliste en relations internationales. S’agissant de la Guerre froide, la course aux armements qui s’y est déroulée n’aurait en rien contribué au renforcement de la sécurité des États, bien au contraire, puisqu’elle a abouti à élever les capacités destructrices des États dans des proportions inégalées à l’époque. De même, un second constat qui pourrait caractériser ces travaux repose sur le fait que, au quotidien, les peuples et les sociétés ont moins à craindre des forces armées d’un État voisin que des mauvaises conditions économiques et sociales de vie, de problèmes sanitaires ou de conflits internes. Dès lors, ce qui ressort de nombre de ces analyses critiques de la sécurité, à partir des années 1990, c’est l’affirmation de l’« individu » comme enjeu de la sécurité, bien plus peut-être que l’État ou encore la société.

De la sécurité de l’État à la sécurité humaine, ou la redéfinition des communautés de référence

L’une des conséquences politiques du raisonnement développé par certaines des analyses critiques de la sécurité conduit ainsi à vouloir transcender les communautés politiques étatiques. Une tentative de dépasser l’État-nation au profit d’une communauté de référence plus vaste, laissant entendre, potentiellement, que c’est au niveau de la communauté humaine mondiale que doit se poser et se régler la question de la sécurité.

Ces discours théoriques, ainsi que les réalités sociales et politiques qu’ils entendent saisir, rendent alors le champ libre, à l’échelle internationale, à l’émergence et à la popularisation de concepts de sécurité que l’on voudrait davantage pratique et en prise avec les besoins des individus. C’est dans ce contexte que se développe le concept de sécurité humaine. On le trouvera défini, notamment, dans le Rapport de la commission sur la sécurité humaine, réuni dans le cadre de l’Organisation des Nations unies. Les auteurs, sous la direction de Sadako Ogata et du Prix Nobel d’économie, Amartya Sen, appellent la communauté internationale à se doter d’un nouveau paradigme de la sécurité. Un nouveau paradigme qui romprait avec la définition de la sécurité issue du XVIIe siècle. Pour les rédacteurs, « la notion de sécurité humaine traite de la sauvegarde et de l’élargissement des libertés civiles essentielles. Il s’agit à la fois de protéger les gens contre les menaces aiguës qui pèsent sur leur sort et de leur donner les moyens de prendre leur destin en main. » (p. 10). « La sécurité humaine complète la sécurité de l’État, contribue à l’exercice des droits de l’homme et renforce le développement humain. Elle cherche à protéger les citoyens contre un vaste ensemble de périls pour l’individu et pour la collectivité. » (p. 15). « La sécurité humaine élargit la notion étroite de sécurité des frontières, pour englober la sécurité des habitants et des communautés dans les frontières et au-delà. L’idée est d’assurer la sécurité du citoyen, et non pas simplement de protéger les territoires contre toute agression extérieure. » (p. 22)[12].

En mêlant tout à la fois sécurité économique, sociale, sanitaire, alimentaire, personnelle, environnementale, politique, ce concept se veut global. Et c’est là toute la complexité du rapport entre la sécurité de l’État et la sécurité de l’individu – rapport que le philosophe Marc Crépon tente de réfléchir et d’articuler dans un travail récent, afin d’« en affranchir la compréhension de tout repli possible sur la sûreté de l’État »[13]. A bien des égards, en effet, cette sécurité de l’individu semble inséparable de l’État – positivement et négativement.

Considérer l’« individu » comme unité de base du concept de sécurité, c’est cependant ouvrir la voie au déclassement de l’État comme communauté de référence, et ce au profit d’une communauté globale s’étendant par-delà les frontières de l’État. Or, dans cette logique, dès lors que l’on fait de la sécurité de l’individu l’enjeu central, il est également possible de poser que l’État lui-même, l’État auquel appartient l’individu, celui dont il est le ressortissant, ou non d’ailleurs, puisse apparaître comme une menace potentielle pour la sécurité de l’individu. D’où ce rappel de Marc Crépon : « De la sécurité, il faudra toujours commencer par rappeler, de façon principielle, que dans l’histoire institutionnelle des régimes démocratiques et plus encore non démocratiques, elle constitue d’abord et simultanément le monopole et l’objectif affiché par les appareils répressifs d’État. »[14].

Dès lors, si, en théorie, et comme le suggère la Commission sur la sécurité humaine des Nations unies dans son rapport, sécurité humaine et sécurité de l’État auraient vocation à être complémentaires, on constate néanmoins, qu’en pratique, elles se révèlent  bien souvent en concurrence. C’est ce que semble attester la nature des discours sécuritaires produits à la suite des attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis. La réponse discursive et politique apportée à ces attaques a ainsi réactivé les schèmes réalistes traditionnels (État, territoire, frontière, identité) et a marqué un retour à la hard security. En territorialisant et en militarisant leur réponse à travers la notion de « guerre au terrorisme », les autorités états-uniennes et nombre d’analystes imposaient l’État comme sujet unique de la sécurité, et suggéraient ainsi que cet acteur demeurait le lieu central depuis lequel devait se définir et s’organiser la sécurité.

Robert Chaouad


[1] Karl Deutsch (eds), Political Community and the North Atlantic Area, Princeton, Princeton University Press, 1957.

[2] Voir la mise en point que les principaux représentants de cette école vont en donner dans les années 1990 : Barry Buzan, Ole Waever, J. De Wilde, Security. A New Framework for Analysis, Boulder, Lynne Rienner, 1998.

[3] Barry Buzan, People, States and Fear : the National Security Problem in International Relations, Brighton, Harvester, 1991 (1re éd. 1983). Lire également, du même auteur, « Rethinking Security after Cold War », Cooperation and Conflict, vol. 32, n° 1, mars 1997.

[4] Ole Waever, « Societal security. The Concept », in O. Waever, B. Buzan, M. Kelstrup, P. Lemaître (eds), Identity, Migration and the New Security Agenda in Europe, Londres, Pinter, 1993. Lire également, O. Waever, « Insécurité, identité: une dialectique sans fin », in Anne-Marie Le Gloannec (dir.), Entre union et nations. L’État en Europe, Paris, Presses de sciences po, 1998.

[5] Didier Bigo, « L’Europe de la sécurité intérieure : penser autrement la sécurité », in Anne-Marie Le Gloannec, Entre Union et nation. L’État en Europe, Paris, Presses de sciences po, 1998, p. 68.

[6] Dario Batistella, Théories des relations internationales, Paris, Presses de sciences po, 2003, p. 450-451.

[7] O. Waever, B. Buzan, M. Kelstrup, P. Lemaître (eds), Identity, Migration and the New Security Agenda in Europe, Londres, Pinter, 1993

[8] Lire, pour une approche critique des travaux de l’école de Copenhague et sur les effets du discours scientifique, Jeff Huysmans, « Dire et écrire la sécurité : le dilemme normatif des études de sécurité », Cultures et conflits, n° 31-32, 1998.

[9] David Campbell, Writing Security: United States Foreign Policy and the Politics of Identity, Minneapolis: University of Minnesota Press, 1992.

[10] Pour des synthèses de ces critical security studies, lire Keith Krause et Michael C. Williams, « From Strategy to Security : Foundations of Critical Security Studies », in Keith Krause et Michael C. Williams (eds), Critical Security Studies : Concepts and Cases, Londres, University College London Press, 1997 ; et Ken Booth (ed), Critical Security Studies and World Politics, Boulder (Co), Lynne Rienner Publishers, 2005. En français, lire Ayse Ceyhan, « Analyser la sécurité : Dillon, Waever, Williams et les autres », Cultures et conflits, n° 31-32, 1998

[11] D. Bigo, « L’Europe de la sécurité intérieure », op. cit., p. 84-85.

[12] Pour la version française, Rapport de la commission sur la sécurité humaine, Paris, Presses de sciences po, 2003.

[13] Marc Crépon, La Culture de la peur. 1. Démocratie, identité, sécurité, Paris, Galilée, coll. « La philosophie en effet », 2008, p. 58.

[14] M. Crépon, ibid, p. 49.