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Les dialectes de la dialectique.

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Prolégomènes à une lecture systématique du thème du langage chez Hegel

Guillaume LEJEUNE


Le langage s’est imposé comme une question majeure de la philosophie au 20ème siècle, à tel point qu’on a pu parler de « Linguistic Turn ». S’il est difficile d’assigner une origine exacte à ce « tournant » dans l’histoire des idées et s’il est probablement abusif  de réduire les problèmes philosophiques à des questions de langage[1], on se doit toutefois de concéder que ces derniers ne se formulent que dans un langage. Les rapports du langage à la pensée, à défaut d’être un champ exclusif d’investigation, constituent dès lors une gageure essentielle de la philosophie.

Si, comme on vient de le faire, on peut justifier à peu de frais le choix d’une étude du langage en général, la question devient plus délicate quand il s’agit d’étudier le langage chez Hegel. À considérer les choses telles qu’elles sont, ce n’est pas par ses réflexions linguistiques que le philosophe idéaliste s’est signalé. Il fait même plutôt pâle figure par rapport à ses contemporains (Humboldt, Schlegel, etc.) qui éclipsent les maigres considérations qu’il consacre au sujet[2].

La thématisation du langage reste, il faut l’avouer, largement implicite chez Hegel. Cela explique, d’ailleurs, dans une large mesure, le peu d’attention qui lui a été portée dans la littérature secondaire eu égard à ce thème. Il faut toutefois apporter ici une nuance qui n’a l’air de rien, mais qui a toute son importance : les réflexions hégéliennes sur le langage ont certes suscité peu de commentaires[3], mais l’usage hégélien du langage, qui n’a d’égal que son élocution, a suscité un nombre important de commentaires[4] ou d’allusions, souvent plutôt sarcastiques, certaines allant jusqu’à affirmer que le philosophe ne parlait pas l’allemand, mais le hégélien[5]. Il est d’ailleurs encore courant de « retraduire » ou de  « renverser » ce que Hegel dit, quand on s’y réfère.

1. Hegel à la lumière de la tradition analytique. De l’analytique pure au pragmatique.

Peut-être devinera-t-on déjà que, derrière ces faits anecdotiques qui colorent la réception d’une philosophie difficile, se manifeste l’essence de l’attention hégélienne au langage, laquelle tient moins à la façon dont il pense « le langage dans la philosophie » qu’à la façon dont il pense sa « philosophie dans le langage ».

En fait, Hegel ne semble pas répondre à nos questions linguistiques parce qu’on l’interroge mal. Pour comprendre un philosophe, il nous faut, comme le dit Collingwood, considérer à quelle question sa philosophie répond.  Faute de considérer l’interrogation qui définit un projet, on méconnaît une philosophie. C’est ce qu’a fait Russell dans sa controverse avec Hegel et les idéalistes anglais. Pour le dire brièvement, Russell s’intéressait à l’analyse du langage abstraction faite de la synthèse de la conscience, alors que dans la dialectique hégélienne, l’analyse et la synthèse vont de pair et se centrent moins sur le langage (Sprache) que sur le caractère  linguistique (Sprachlichkeit) du penser. À cause de ce hiatus entre son projet et celui de Hegel, Russell, en posant les fondements de la tradition analytique, a installé l’idéalisme et son langage dans un mépris durable[6].

Le passage de l’analyse de propositions finies à une pragmatique sociale du langage qui s’opère avec des philosophies comme celle de Sellars n’a contribué que récemment à changer la donne. Si le langage reste, suite à ce « pragmatic turn », le point d’Archimède, il n’est plus envisagé sous le même angle d’attaque. Ce n’est qu’à partir de (et grâce à) ce changement d’angle de vue, que Hegel n’apparaît plus comme un paria pour les philosophes analytiques et est réhabilité en partie par un Brandom ou un Mc Dowell.  De là, on peut soupçonner que ce qui explique le mépris dont Hegel a fait l’objet dans la philosophie analytique, ainsi que son absence de théorie explicite du langage, tient moins à un désintérêt pour le langage qu’à la spécificité de l’intérêt qu’il porte à ce thème.

La sanction du tribunal de l’histoire n’est donc pas sans appel, l’instruction était insuffisante, on n’a pas cherché le langage là où il se trouvait chez Hegel. On a investigué le corps de sa philosophie en marginalisant ses réflexions sur sa philosophie (correspondance, préfaces, remarques, …), qui expriment pourtant le sens de sa pratique de la philosophie. Si l’on veut être juste, il faut dire que Hegel s’intéresse beaucoup au langage en tant que forme dans laquelle sa philosophie doit se dire, mais peu comme thème de sa philosophie. C’est dans une perspective pragmatique, plus que sémantique ou syntaxique, que le langage retient son attention.

Cet intérêt pragmatique pour le langage mal entendu par les adeptes de la méthode d’investigation analytique dans sa mouture russellienne explique que le langage soit resté un terrain en friche de la réception de Hegel, mais n’implique pas l’absence d’intérêt de ses considérations. Que Hegel thématise peu « le langage dans sa philosophie » comme le voudrait la tradition analytique, est ainsi compensé par une démarche qui consiste à penser « la philosophie dans le langage »[7].

Pour comprendre plus précisément cette position de Hegel quant au langage,  il faut le resituer dans le contexte de son époque – époque qui par son attention pour le langage annonce le 20ème siècle, mais qui s’en différencie aussi par la façon dont elle en vient à aborder cet objet[8].

2. Hegel dans le contexte de son temps. Penser « la philosophie dans le langage »

À la fin du 18ème siècle, ce sont des évènements politico-culturels –  la redécouverte du sanskrit et l’essor des langues nationales – qui suscitent un intérêt majeur pour le langage, lequel s’incarne dans des courants tels que la métacritique (Hamann, Herder[9]), le romantisme (les frères Schlegel) et la linguistique comparée (Humboldt, Bopp).  Les réflexions théoriques sur le langage ne sont ainsi que le reflet de l’importance pratique que revêt le langage dans la culture d’alors. Humboldt, qui consacre pour finir sa vie à l’étude des langues, ne le fait que dans le but anthropologique de répondre à la question kantienne : « qu’est-ce que l’homme ? ».

Le langage n’est objet théorique qu’indissociablement du fait qu’il appartient aux manifestations anthropologiques et sociales. C’est d’ailleurs cet ancrage culturel alors prépondérant, dont Kant, contrairement à Herder ou à Fries, veut prémunir le champ transcendantal, qui  conduit le philosophe de Königsberg à reléguer la question du langage au champ de son Anthropologie.

L’impossibilité revendiquée par Kant dans ses Prolégomènes[10] d’opérer une déduction transcendantale de la langue à partir d’un fait de la raison l’expose cependant au relativisme linguistique de la métacritique, et met à mal sa prétention scientifique fondée sur le présupposé d’une raison universelle. C’est pourquoi Fichte, outrepassant les limites de la Critique de la raison pure, dans le but pratique de garantir la vitalité du discours kantien, élabore en 1795 une déduction transcendantale du langage[11]. Par là, Fichte sauve la philosophie transcendantale de la métacritique dont on peut penser qu’il avait eu vent dès cette époque[12]. Il reste cependant que, bien qu’il ne soit pas exclu de la sphère du connaître transcendantal, le langage n’apparaît pas comme premier, mais comme un moment du procès réflexif qui implique toujours un élément « translinguistique », à savoir l’acte de réflexion[13].

Cet élément « translinguistique » qu’est l’acte de réflexion, Hegel le reprend, mais le situe dans la négativité du langage, dans la logique à l’œuvre dans la discursivité du langage. La réflexion n’organise plus extérieurement le langage, comme chez Fichte, ce qui conduisait ce dernier à une tension insoluble entre la vivacité de la parole et la réification du discours, mais l’organise du dedans, plus précisément, ainsi que le montre le début de la Phénoménologie, c’est dans l’instanciation subjective du discours que naît l’écart différentiel entre dire et vouloir dire qui fait de l’homme une conscience pensante[14].

Le langage, en son essence même, ne signifie plus un moment du penser qui « vise » (à l’instar de Fichte) l’absolu, pas plus qu’il ne « figure esthétiquement » (à l’instar de Schelling) l’absolu[15]. Il n’est ni ce dans quoi on pose subjectivement l’absolu, ni ce dans quoi se dépose objectivement l’absolu, il est ce dans quoi se transpose (übersetzt) l’absolu, il est comme le dit Hegel, avec sa clarté habituelle, « l’invisibilité visible de son essence »[16].

Le langage est ce en quoi l’absolu a lieu, il est son élocution. En donnant mouvement par sa logique à l’économie statique de l’être, Hegel évite la localisation (Schelling) ou le non-lieu perpétuel (Fichte) de l’absolu. Il fait de l’absolu un mouvement qui se comprend dans le langage, dans l’élocution. Le mouvement de l’absolu, qui n’est autre que celui de la pensée pour Hegel, est ainsi un mouvement immanent au langage. Comme il l’écrit dans son Encyclopédie, « c’est en noms que nous pensons » (§ 459). Cela ne veut certes pas dire que le langage en soi soit la pensée. Mais, en affirmant le caractère corrélatif du penser et du langage, Hegel fait par là même du langage le milieu de son philosopher. Le thème du langage, quasi absent chez Kant, devient donc central chez Hegel.

Mais, dans les faits, il semble que Hegel ait ignoré ce rôle central du langage dans sa philosophie. Selon Theodor Litt[17] et d’autres à sa suite[18], Hegel aurait assigné une place centrale au langage, mais n’en aurait pas été conscient.

Dans cet ordre d’idée Damjanovic[19] remarque que Hegel, d’une part, ne traite du langage qu’en passant, et que, d’autre part, il développe des dialectiques essentielles, dont l’ancrage n’est pas seulement linguistique (économie, police, …) . De telles critiques ne nous paraissent toutefois pas décisives. D’une part, le fait que le langage soit peu traité explicitement n’implique pas qu’il ait une importance mineure. Hegel, à défaut d’être prolixe, est édifiant quand il parle du langage. L’enthousiasme de ses déclarations compense ainsi leur concision. D’autre part, le fait que les dialectiques qui dynamisent le système ne se réduisent pas au langage ne constitue pas une raison suffisante pour ne pas étudier le langage : un thème peut être prégnant sans pour autant être exclusif.

A défaut d’argument décisif, les sceptiques procèdent alors par rétorsion et constatent qu’il n’y a pas, hormis quelques textes, de théorie explicite du langage chez Hegel. Ce fait, s’il montre l’inexistence d’une théorie analytique du langage développée, n’empêche en rien un « autre » type de préoccupation linguistique chez le philosophe allemand. Il s’agit ainsi, comme on l’a déjà dit, moins pour Hegel de penser le langage dans la philosophie que de penser la philosophie dans le langage[20] – problème qui définit d’ailleurs déjà, comme l’a bien vu Dieter Henrich, le projet fichtéen[21]. En fait, en attribuant au langage le statut d’un médium, Hegel s’interdit de l’étudier pour lui-même au sein du système[22], mais il se donne la tâche d’écrire son système dans le langage de l’absolu.

L’idée de penser la philosophie dans le langage peut paraître banale, mais elle doit être comprise en un sens fort. Il ne s’agit pas de voir comment on va formuler une pensée déjà formée[23], mais bien de penser à même le langage, de former sa pensée dans le langage ou encore, si l’on change le point de vue, d’ « informer le langage ».

Comme l’a montré Reid[24], dans le cas de Hegel, il ne s’agit pas seulement de penser dans le langage, mais de penser dans les discours existants. Hegel élabore sa philosophie non sur une observation empirique ou en expérimentant, mais en informant les discours existants. En développant leur logique immanente, il atteint un point où la transposition d’un discours dans un autre est possible. Cela lui permet de rétablir la communication entre les savoirs. La science de la science prend ainsi le caractère concret d’une science des sciences que Hegel nomme Encyclopédie et qu’on peut opposer à sa mouture abstraite qu’est la Wissenschaftlehre de Fichte. Dans l’Encyclopédie, la dialectique se dessine dans et par ses différents dialectes qui attestent de la Sprachlichkeit concrète du penser. En montrant comment les dialectes scientifiques se transposent les uns dans les autres, Hegel développe la pensée au-delà de toute référence finie et en fait le nœud de l’autoréférence[25] d’une expérience du sens. C’est cette autoréférentialité de l’expérience que Hegel nomme savoir absolu et c’est elle qui définit la nouvelle sémantique que Hegel entend laisser transparaître dans son discours – nouvelle sémantique, qui rompant avec la conception du vrai comme « adaequatio rei et intellectus » et avec la référentialité comme base sémantique, se définit comme autodétermination, égalité à soi du concept (Enc. §24, add. 2). En d’autres termes, et plus simplement, la tâche absolue de la philosophie – « penser » les pensées – ne signifie pas seulement le fait de répéter ou de juxtaposer des pensées référentielles toutes faites, mais signifie au contraire l’action de les produire à partir du centre de leur autoréférence, ce qui implique de développer l’auto-poïèse des concepts à même la « Sprachlichkeit » de la pensée – tâche qu’entend endosser le projet idéaliste de penser « la philosophie dans le langage » – qui chez Hegel prend la figure concrète d’un « philosopher dans les discours ».

Guillaume Lejeune, Aspirant du FRS-FNRS, Université Libre de Bruxelles.

Guillaume Lejeune est, depuis octobre 2008, Aspirant du FNRS à la faculté de philosophie et lettres (section philosophie) de l’Université Libre de Bruxelles où il prépare une thèse sur le langage chez Hegel sous la direction du professeur M. Peeters. Il est membre de la Fichte-Gesellschaft ainsi que du groupe de travail «Transzendentalphilosophie / Deutscher Idealismus». Il est également collaborateur au Bulletin de littérature hégélienne des Archives de Philosophie. Il a effectué divers séjours de recherches à l’étranger : à Berlin, au Hegel-Archiv de Bochum et à Paris. Ses travaux portent essentiellement sur le langage dans l’idéalisme allemand. Il a écrit des recensions pour la revue Dialogue et pour les Hegel-Studien.


[1] Comme l’écrit Adorno, « la participation constitutive de la langue à la vérité ne fonde aucune identité des deux ». Adorno, T.W., Dialectique négative, Paris, Payot,  1978, p. 93.

[2] Cf. Schindler, B., Die Sagbarkeit des Unsagbaren: Hegels Weg zur Sprache des konkreten Begriffs, Königshausen & Neumann, Würzburg, 1994, pp. 9-12.

[3] Signalons quand même, dans le champ des philosophes connus, les articles classiques de Derrida (« Le puits et la Pyramide ») et de Habermas (« Travail et interaction »). Dans le champ des commentateurs reconnus, les récents articles de Bourgeois (« La philosophie du langage dans la Phénoménologie de l’esprit »)  et de Hoffmann («Hegels Sprachphilosophie») nuancent la radicalité de mon propos. Notons toutefois que les commentaires se centrent le plus souvent sur la Phénoménologie, l’Esprit subjectif ou la Realphilosophie d’Iéna, ce qui est naturellement réducteur et ne permet pas de présenter une vue globale des réflexions hégéliennes. Bodammer a dressé un éventail plus exhaustif des différentes vues de Hegel sur le langage (Hegels Deutung der Sprache), il est malheureusement incapable d’articuler ces aspects les uns aux autres. Cook, lui, présente les différents aspects selon une liaison généalogique (Language in the Philosophy of Hegel), ce qui est intéressant, sa démarche devrait pourtant se compléter par une articulation systématique. Les seules démarches qui se veulent systématiques partent de perspectives trop peu informées (Vernon, Hegel’s theory of language) ou imprégnées de partis pris idéologiques (Liebrucks, Sprache und Bewusstsein).

[4] Citons avant tout les commentaires atemporels de : Royce, J., « Hegel’s terminology »  in Baldwin (éd.), Dictionary of philosophy and psychology, New York, Mac Millan, 1901 ; et de Koyré, A., «Note sur la langue et la terminologie hégélienne», Revue philosophique de la France et l’étranger, CXII, 1931.

[5] Sur l’obscurité hégélienne, voir mon article : « L’obscurité philosophique. Étude du cas ‘Hegel’ », Revue Baobab, n°6, Abscons du discours obscur,  nov. 2010.

http://www.revuebaobab.org/images/pdf/baobab006/revue%20baobab%20abscons%20online.pdf

[6] Voir, à ce sujet, mon article : « Holismus und Atomismus. Die analytische Tradition im Lichte der Hegelschen Philosophie », Hegel-Jahrbuch, à paraître en 2012.

[7] L’attention portée au problème du rapport de l’absolu aux formes finies du langage par les commentateurs allemands comme Josef Simon et Werner Marx, ainsi que l’attention portée au discours chez les Français de Kojève à Lebrun, confirme bien l’idée que l’enjeu pour Hegel est de penser sa philosophie dans le langage. Mais ce que les commentateurs en général omettent de dire, c’est que Hegel est pleinement conscient des difficultés de cette tâche, tant en ce qui concerne l’énonciation, qu’en ce qui concerne la communication de l’absolu, puisqu’il n’hésite pas à doubler la trame de son discours d’«adjonctions extérieures, afin de mieux initier le lecteur » (« Lettre à Hinrichs du 7 avril 1821 » in Hegel, Correspondance, Paris, Gallimard, 1963, vol. 2, p. 223 ss.).

[8] Voir à ce sujet les travaux de Lia Formigari, Joachim Gessinger et Denis Thouard.

[9] On entend sous ce terme les philosophes, qui à la suite de Hamann (Métacritique du purisme de la raison, livre publié en 1800, mais écrit en 1784) et de Herder (Métacritique, 1799)  affirmèrent les limites de la critique kantienne, en affirmant que le projet critique fait l’impasse du caractère langagier de la pensée.

[10] « Dégager de la connaissance commune les concepts qui ne se fondent pas sur une expérience particulière et qui se trouvent néanmoins dans toute connaissance d’expérience dont ils constituent en quelque sorte la simple forme de liaison n’exigeait pas plus de réflexion ou de pénétration que de dégager, en général, d’une langue, les règles du véritable usage des mots et de réunir ainsi les éléments d’une grammaire (en fait ces deux entreprises sont très proches parentes), sans pouvoir indiquer toutefois la raison pour laquelle chaque langue possède précisément tel caractère formel et non tel autre, encore moins pourquoi on peut en général y trouver tel nombre de ces déterminations formelles, ni plus ni moins. » Kant, I, Prolégomènes à toute métaphysique future qui pourra se présenter comme science (trad. Gibelin), Paris, Vrin, 1968, § 39, pp. 99-100.

[11] Fichte, J.G., „Vom der Sprachfähigkeit und dem Ursprung der Sprache“ (1795), GA, I, 3, pp. 97 ss.

[12] Beiser, F, The Fate of reason. German Philosophy from Kant to Fichte, Harvard University Press, 1987.

[13] Voir à ce propos la critique de Heyse, K.W.L., System der Sprachwissenschaft (hg. Steinthal), Berlin, 1856.

[14] Voir Agamben, G, Le langage et la mort. Un séminaire sur le lieu de la négativité, Paris, Bourgois, 1991.

[15] Pour Fichte, „Sprache, im weiteste Sinne des Worts, ist der Ausdruck unserer Gedanken durch willkürliche Zeichen“ (GA, I, 3, p. 97), tandis que, selon la Philosophie de l’art de Schelling, le langage est „das entsprechende Symbol der absoluten oder unendlichen Affirmation Gottes“ (Philosophie der Kunst, SSW V, p. 483). Voir, à ce propos, mon article : « L’art de la philosophie et la philosophie de l’art. À propos du langage chez Fichte et Schelling ». http://www.europhilosophie.eu/recherche/IMG/pdf/10-Lejeune-beitrag.pdf

[16] Hegel, Phénoménologie (trad. Jarczyk et Labarrière), Paris, Folio-Gallimard, 2003, p. 315.

[17] Litt, T., Hegel. Versuch einer kritischen Erneuerung, Heidelberg 1953.

[18] Voir entre autres : Simon, J., Das Problem der Sprache bei Hegel, Stuttgart, Kohlhammer, 1966; et Liebrucks,B., Sprache und Bewusstsein , Akademische Verlagsgesellschaft, Frankfurt am Main,vol 1-10. Du côté francophone, Yvon Gauthier pense que la Phénoménologie de l’esprit est une Phénoménologie du langage et que si Hegel en avait été conscient, il aurait troqué le terme d’esprit pour celui de langage (Gauthier, Y., L’arc et le cercle. L’essence du langage chez Hegel et Hölderlin, Paris, Desclée de Brouwer, Montréal, Bellarmin, 1969).

[19] Cf. Damjanovic, M., « Kann die Sprache im System Hegels die Position des Absoluten einnehmen? », Hegel-Jahrbuch, 1971.

[20] La formation du système à Iéna est coextensive d’une réflexion sur le mode qui convienne à présenter (darstellen) la philosophie. « La cloison entre la terminologie de la philosophie et celle de la conscience commune reste encore à percer » (Hegel, Notes et fragments (Iéna 1803-1806) (trad. Colliot-Thélène, Jarczyk, Kervégan, Labarrière, Lacroix, Lécrivain, Longuenesse, Souche-Dagues, Waisgrus), Paris, Aubier, 1991, p 79.) “Luther a fait parler la Bible en Allemand, vous Homère, (…) je voudrais pour ma part tenter d’apprendre à faire parler allemand la philosophie”. (Hegel, Briefe, Meiner, Hamburg, 1952, vol I, p. 99, Brief an Voss (1805)). De même que Luther n’aurait pu accomplir sa Réforme sans traduire la Bible en allemand (Hegel, Werke 20, Vorlesungen über die Geschichte der Philosophie, Frankfurt, Suhrkamp, p. 52), la nouveauté philosophique de Hegel est indissociable d’un travail dans la langue : la philosophie doit se dire dans le langage naturel, à défaut de quoi elle ne se réalise pas, elle ne peut faire tenir ensemble sa lettre et son esprit.

[21] Henrich, D.,“Philosophie in der Sprache”, Information Philosophie, 2007. Voir aussi Zahn, M., „Fichtes Sprachproblem und die Darstellung der Wissenschaftlehre“. In Hammacher, K., (ed.), Der transzendentale Gedanke, Hamburg, Meiner, 1981.

[22] Adorno dit que le langage est dissout dans le système. Adorno, „Skoteinos oder wie zu lesen sei“ in Trois études sur Hegel (trad. Collège de philosophie), Paris, Payot, 1979.

[23] Ce qui est encore le cas chez Kant. Comme le montre Dimitrios Markis, la place du langage chez Kant – son exclusion de la sphère de la raison pure – procède d’une longue tradition de préjugés, plus précisément un platonisme des idées, selon lequel le langage serait seulement une copie sensible des pensées. Voir: Markis, D., „Das Problem der Sprache bei Kant“. In Dimensionen der Sprache in der Philosophie des deutschen Idealismus, hg. von Scheer, Brigitte und Wohlfart, Günther, Würzburg, 1982. Voir aussi Villers, J., Kant und das Problem der Sprache. Die historischen und systematischen Gründe für die Sprachlosigkeit der Tranzendentalphilosophie, Konstanz, 1997.

[24] Reid, J., Real Words: Language and System in Hegel, Toronto, University of Toronto Press, 2007.

[25] Sur l’idée d’auto-référence chez Hegel, on consultera Livet, P., « Réflexions et extériorité dans la logique de Hegel », Archives de Philosophie, 1984 et mon article « Système et langage chez Hegel à la lumière du concept logique de paraconsistance », Revue Mosaïque, n°4, 2010. http://revuemosaique.net/wordpress/wp-content/uploads/2010/06/MOSAIQUE-4.4_LEJEUNE.pdf

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