Bergson ou la scienceSciences et métaphysiqueune

Bergson et la causalité de l’exemple à la lumière des sciences sociales et biologiques : charisme, imitation, émotion (II)

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Arnaud Bouaniche, Agrégé et docteur en philosophie, professeur en CPGE

Bergson et l’imitation : de la sociologie de Gabriel Tarde à la théorie contemporaine des « neurones miroirs »

Pourtant, si Bergson dialogue bien ici, ou plus exactement pense avec les sciences sociales de son temps, ce n’est toutefois pas directement et consciemment autour de l’œuvre de Max Weber – dont la réception en France n’interviendra qu’après la parution des Deux Sources, notamment par l’intermédiaire de Raymond Aron[1] –, mais bien plutôt dans une proximité plus vraisemblable avec celle de Gabriel Tarde, que, en revanche, il admire et connaît très bien[2]. A plusieurs reprises, Bergson paraît en effet reprendre discrètement à Tarde son concept d’imitation pour expliciter la nature du processus par lequel les grandes personnalités morales entraînent les autres hommes à leur suite. Le lien entre ce phénomène d’entraînement (dont nous avons relevé plus haut l’importance) et l’imitation est d’ailleurs explicitement marqué par Tarde, dans un cours donné au Collège de France en 1902-1903 autour de l’œuvre d’Augustin Cournot, dans lequel il s’efforce, dans les pas de celui qu’il admire et critique à la fois, de préciser son propre concept d’imitation, qu’il fait jouer dans le cadre de la compréhension du phénomène d’invention et de transmission d’un terme nouveau dans les langues :

Quel est donc ce principe de propagation qui est propre aux langues ? Ne serait-ce pas ce phénomène que, un peu plus loin, il [Cournot] désigne sous le nom d’entraînement, auquel même, en passant, il lui arrive de donner son vrai nom, l’imitation, mais dont il semble n’avoir pas soupçonné la portée[3] ?

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Soit l’apparition et l’adoption, dans une langue donnée, d’un mot nouveau. Ce que Cournot n’a pas vu selon Tarde, c’est que cette innovation linguistique n’est pas à chercher dans un processus impersonnel qui aurait son origine dans un quelconque « génie de la langue », mais dans la propagation par imitation d’une invention individuelle, autrement dit dans la relation d’imitateurs à un ou plusieurs inventeurs qui servent de modèles. Aussi, lorsque Bergson se demande, dans le premier chapitre des Deux Sources, pourquoi les « saints » ont des « imitateurs », en distinguant, d’un côté, « l’universelle acceptation » de la « loi », qui fonde la morale close, et, de l’autre, la « commune imitation d’un modèle[4] », qui caractérise selon lui la morale ouverte, il se montre sans le dire, très proche de Tarde.

Trois points, en effet, ont pu retenir l’attention de Bergson dans le concept d’imitation proposé par Tarde. À travers ce concept, il s’agit bien pour le sociologue de dégager un type d’intelligibilité, ou de légalité propre aux sociétés, et ce faisant aux esprits. Par là, Tarde s’inscrit résolument dans ce que l’on pourrait considérer comme le moment des sciences de l’esprit, dans lequel il viendrait se placer, avec Bergson, du côté de ceux qui, comme Dilthey à la même époque, refusent l’alignement des sciences humaines sur les sciences expérimentales, au nom d’un déterminisme radical réduisant les idées et les actes à des événements purement physiques :

L’imitation, écrit Bergson dans son discours sur Tarde, est donc la vraie loi, aussi universelle dans le monde des esprits que la gravitation dans le monde des corps. Mais à la différence de la loi de gravitation, c’est une loi souple, et flexible, comme tout ce qui est humain[5].

La manière dont Bergson s’efforce de formuler ici les enjeux qui gravitent autour de la notion d’imitation, paraît une réeffectuation du geste proposé par Hume, les conséquences sceptiques en moins : comme l’association, l’imitation aurait, dans le domaine de l’esprit, la même valeur que la gravitation dans le domaine des corps. Pourtant, le projet est bien ici métaphysique, en ce sens que l’imitation est un principe réellement à l’œuvre dans l’univers, explicatif des sociétés, en tant qu’il renvoie à l’une des trois formes de la « Répétition universelle », aux côtés de « l’ondulation », qui gouverne la matière, et de « l’hérédité » qui commande le monde des êtres vivants. C’est grâce à cette répétition que, dans tous les domaines, des similitudes, et par conséquent des quantités, peuvent être dégagées, qui rendent possible, à chaque fois, une connaissance rigoureuse, soit : la physique, la biologie et la sociologie.

Bergson reprend en outre comme un leitmotiv l’idée, récurrente chez Tarde, selon laquelle s’il y a des imitateurs ou des continuateurs, c’est parce qu’il y a d’abord des inventeurs ou des initiateurs : « Qui dit imitation, écrit Tarde, dit invention, innovation, par la même raison qu’une série suppose un premier terme[6]. » Ainsi, lorsqu’il aborde la question du progrès social, en récusant l’idée selon laquelle cette transformation se serait faite d’elle-même, « en vertu de l’état d’âme de la société à une certaine période de son histoire[7] », Bergson paraît reprendre exactement la critique adressée par Tarde à Cournot, lorsque celui-ci expliquait l’apparition d’un mot nouveau dans une langue, par le « génie » de cette langue. Au contraire, pour que la société s’engage dans une transformation, il faut, selon Bergson, « qu’elle se soit laissée convaincre ou tout au moins ébranler », et, ajoute-t-il, « le branle a toujours été donné par quelqu’un[8]. » L’opposition à Durkheim serait ici frontale. À la fin de Sociologie et philosophie par exemple, celui-ci déclare que bien loin que ce soit l’individu qui modifie la société, c’est la société qui « l’oblige à se hausser au-dessus de lui-même », qui « enlève l’individu à lui-même et […] l’entraîne dans un cercle de vie supérieur[9]. » Or, pour Bergson, ce n’est pas la société qui transforme l’individu, mais l’individu qui transforme la société, ou plutôt, comme on l’a vu, certains individus qui sont des créateurs, et à condition de préciser que, comme on l’a vu également, sans être eux-mêmes des législateurs au sens fort, leur création morale devra prendre corps dans des lois qui donneront au changement son effectivité. Cette nécessité d’une création individuelle repose en réalité sur une thèse extrêmement forte qui soustrait définitivement Bergson à tout réductionnisme : une société n’est pas un organisme. En ce sens, il n’y a pas de justice naturelle en vertu de laquelle la société pourrait s’autoréguler, ce que Georges Canguilhem a parfaitement vu dans une étude remarquable :

Le signe objectif qu’il n’y a pas d’autorégulation sociale, que la société n’est pas un organisme et que par conséquent son état normal est peut-être le désordre et la crise, c’est le besoin périodique du héros qu’éprouvent les sociétés[10].

On voit à quel point le thème de l’influence des grands hommes dans l’histoire a des enjeux profonds, qui sont à la fois épistémologiques (qu’est-ce qu’une société ? peut-on l’assimiler à un organisme ?) et politiques, le glissement du social à l’organisme pouvant avoir idéologiquement des effets désastreux.

Il y a enfin un troisième aspect de l’imitation chez Tarde qui retient Bergson et ouvre entre eux un espace commun : pour l’un comme pour l’autre, il n’y a place dans l’histoire que pour la causalité de l’exemple[11], qui se distingue de la causalité mécaniste par impulsion, puisque ses moments se succèdent sans se déterminer rigoureusement, et substitue aux enchaînements nécessaires, des procès à voies multiples dont l’origine est une création contingente. C’est bien en terme de causalité que Bergson souligne l’apport de Tarde :

Ce qui domine toute sa philosophie, c’est un certain point de vue très original sur la causalité. La causalité par excellence est, à ses yeux, celle qui opère dans les sociétés humaines, où un individu invente et où d’autres individus l’imitent. Elle ne se ramène à aucun des types de causalité décrits par les physiciens et les métaphysiciens. L’imitation […] est une certaine action sui generis qui s’exerce d’esprit à esprit[12].

Un tel passage montre de manière explicite que Bergson est parfaitement conscient des enjeux épistémologiques qui sous-tendent la question de l’influence des personnalités exemplaires, et que lorsqu’il évoque un « appel », une « aspiration » ou une « attraction » des grands hommes de bien, il vise un type de forces spécifique qui, pour ne pas être physique, ni relever d’une causalité mécanique, n’en implique pas moins un mode d’action spécifique, des inventeurs sur les continuateurs, susceptible d’être conçu rigoureusement.

Ces points de convergences remarquables entre les deux penseurs ne sauraient cependant masquer cette divergence majeure : la double dissolution, chez Tarde, 1° des « grands hommes » dans la multiplicité des « petits » hommes, et 2° de l’individu dans la prolifération des idées minuscules, qui sont autant « d’infinitésimales innovations apportées par chacun à l’œuvre commune ». Tarde est ainsi beaucoup moins un penseur des créateurs et des inventeurs, que de la création et de l’invention qui se joue dans les flux imitatifs, qui se résolvent finalement en éléments non-subjectifs et non-conscients, qui, selon lui, sont de l’ordre du désir et de la croyance et agissent à un niveau où il n’y a pas d’individu constitué[13], selon une perspective qui l’éloignerait aussi bien de Durkheim que de Bergson, chez qui l’individu continue d’avoir une place et un statut, que ce soit pour le dépasser (Durkheim) ou pour y revenir (Bergson).

Cependant, cette confrontation des perspectives de Bergson et de Tarde à travers les thèmes de la causalité de l’exemple et de l’imitation, pourrait bien présenter un intérêt allant au-delà d’une analyse d’influence. Elle serait en effet susceptible d’ouvrir sur le rapprochement des thèses de Bergson avec une théorie neurobiologique contemporaine, à même de jeter sur elles un éclairage inattendu. Voici en effet comment Tarde définit l’imitation :

[…] une action à distance d’un esprit sur un autre, action qui consiste dans une reproduction quasi-photographique d’un cliché cérébral par la plaque sensible d’un autre cerveau[14].

En rattachant ainsi l’imitation à un processus inter-cérébral, Tarde formule une conception qui présente une proximité troublante avec la récente théorie dite des « neurones miroirs », qui, par ricochet, pourrait donc retentir sur la conception bergsonienne de la morale ouverte.

            De quoi s’agit-il ? En 1996 à Parme, sous l’impulsion du professeur Giacomo Rizzolatti, une équipe de chercheurs est parvenu à mettre en évidence, chez le singe puis chez l’homme, l’existence d’une certaine activité du cerveau, appelée « miroir », en vertu de laquelle ce sont les mêmes aires cérébrales qui s’activent chez celui qui accomplit une action et chez celui qui observe l’accomplissement de cette même action. Par là, certains arguments décisifs peuvent être tirés en faveur de la thèse selon laquelle la compréhension des actes d’autrui est avant tout motrice. Une telle découverte est susceptible d’avoir des retombées pratiques et théoriques sur un grand nombre de domaines, mais son champ d’application privilégié est sans doute celui de la compréhension de l’intersubjectivité et de la socialité, en ce sens qu’elle explicite un véritable entrelacement entre les actions et les intentions qui produit un « espace d’actions partagées, à l’intérieur duquel chaque acte et chaque chaîne d’actes, les nôtres et ceux d’autrui, apparaissent immédiatement inscrits et compris[15]. »

            Que peut-on attendre de la mise en perspective des analyses du dernier Bergson avec la théorie des neurones miroirs ? Si cette démarche n’est pas totalement artificielle, c’est pour au moins trois raisons.

Il semblerait que cette théorie permette tout d’abord d’éclairer notre problème, celui de la causalité de l’exemple. Exactement comme Bergson aux prises avec la morale de l’appel, elle s’efforce en effet d’expliquer les phénomènes d’écho ou de résonance que suscite en nous le comportement d’un autre. Car tel est bien aux yeux de Bergson l’énigme du grand homme : « quand il parle, il y a, au fond de la plupart des hommes, quelque chose qui lui fait imperceptiblement écho[16]. » Y aurait-il ici un phénomène inter-cérébral mettant en jeu des « neurones miroirs », aussi appelées dans cette théorie « neurones… échos » ? Rapporter le phénomène de l’imitation au cerveau, c’est-à-dire au corps, serait d’autre part tout à fait conforme à la perspective de Bergson qui est bien, comme il ne cesse de le rappeler lui-même, de rabattre la morale et l’obligation sur le plan général de la vie. Plus encore, en déclarant, ainsi qu’il le fait à travers la célèbre formule finale du premier chapitre des Deux Sources[17] : « toute morale [y compris donc la morale ouverte !] est d’essence biologique [et non pas « vitale », comme il aurait pu écrire] », Bergson, paraît bien légitimer le recours non pas à la vie en général, mais à son étude scientifique, à laquelle appartient aussi la neurobiologie, qu’il a d’ailleurs lui-même si profondément explorée dans son œuvre, notamment dans Matière et mémoire, mais également dans sa conférence de 1911, « L’âme et le corps », où il est au passage justement question de la fameuse aire de Broca[18], qui est précisément celle où sont localisés les neurones miroirs !

Ce ne serait donc pas être infidèle à la philosophie de Bergson que de prolonger et raccorder en quelque sorte le mouvement de ses concepts sur de nouvelles « lignes de faits », empruntées à un domaine, celui de la neurophysiologie du cerveau[19], qui avait déjà retenu toute son attention, non seulement dans Matière et Mémoire (1896), mais aussi dans des essais plus spécifiques comme « Le cerveau et la pensée[20] », et jusque dans les dernières pages des Deux Sources. C’est même à l’occasion de la question des rapports entre le fait psychologique et son substrat cérébral, telle qu’elle peut être posée et abordée à partir de l’aphasie, que Bergson fut conduit à préciser en 1901, pour la première fois dans son œuvre, sa conception des rapports entre science et métaphysique, en revendiquant la nécessité pour la métaphysique de se faire empirique au contact des sciences[21]. Et lorsque Gilles Deleuze explique que « revenir à Bergson » n’aurait à ses yeux de sens, qu’à reprendre sa tentative aujourd’hui, en rapport avec les transformations de la vie et de la société, et en concomitance avec les transformations de la science, c’est encore en référence aux développements de la « neurobiologie moléculaire contemporaine » qu’il le fait[22].

Mais le plus décisif nous paraît résider surtout dans les thèses de Bergson elles-mêmes soutenues dans les Deux Sources. On y trouve en effet à la lettre l’idée fondamentale de cette théorie des « neurones miroirs », selon laquelle la compréhension des intentions d’autrui est motrice. Ce point est capital, parce qu’il permet de comprendre le mécanisme en vertu duquel nous suivons les grands hommes de bien. Bergson explique ainsi, à propos de l’émotion musicale, qu’il nous semble,

pendant que nous écoutons, que nous ne pourrions pas vouloir autre chose que ce que la musique nous suggère, et que c’est bien ainsi que nous agirions naturellement, nécessairement, si nous ne reposions d’agir en écoutant[23].

Mais justement, sommes-nous réellement spectateurs, c’est-à-dire seulement passifs ou réceptifs dans l’écoute musicale ? C’est ce dont on peut douter. Que se passe-t-il en effet quand la musique « pleure » ? Nous pleurons, non seulement nous, mais toute l’humanité. Qu’est-ce que cela signifie ? Quelque chose de très proche de ce qui est proposé par la théorie des neurones miroirs : ce n’est pas la musique, ou le musicien, qui introduit le sentiment de tristesse afin que je le traduise ensuite en pleurs. C’est bien plutôt la musique qui nous introduit dans ce sentiment, « comme des passants qu’on pousserait dans une danse[24] », en ce sens que la compréhension consiste en une effectuation. Il en est de même en morale, où les individus exemplaires « nous font entrer avec eux dans cette musique, pour que nous la traduisions en mouvement[25]. » Il n’y a plus dès lors d’écart ou de différence entre entendre et comprendre, voir et vouloir. Or, cette coïncidence entre « voir » et « vouloir » est très exactement ce que Bergson appelle « intuition », de sorte que se trouverait éclairé, à travers cette rencontre virtuelle entre Bergson et les neurones miroirs, le cœur de sa philosophie. Connaître intuitivement une chose, c’est lui supposer une intériorité, et par conséquent entrer dans une relation subjective avec elle. L’acte de se transporter dans cette chose est justement ce que Bergson appelle encore « sympathie », l’autre nom de l’intuition. Si nous sommes capables d’entrer en résonnance ou de vibrer avec les choses, c’est parce qu’elles ne nous sont pas étrangères, mais parce qu’il y a entre elles et nous une connivence. Et lorsque, dans un texte tardif, de 1922, Bergson cherche à proposer une saisie analogique de l’intuition, c’est du côté de la lecture à voix haute qu’il se tourne : saisir le sens d’une phrase, c’est l’effectuer dynamiquement à travers une séquence motrice, celle de la profération ou de la diction correcte[26]. De même comprendre la pensée d’un autre, une autre pensée, n’est possible qu’à la condition de se mettre « dans l’attitude » où nous pourrons la saisir[27]. De même donc, être entraîné par les grandes personnalités morales, ce n’est pas être contraint par elle, mais agir selon elles, sur le même modèle que l’exécution d’une partition musicale, qui ne nous impose rien que nous n’acceptions.

Mais en croisant librement les thèses de Bergson avec la théorie des « neurones miroirs », on pourrait tenter d’envisager sous un jour nouveau cet entraînement de l’humanité à la suite des grandes personnalités morales. En un passage remarquable des Deux Sources, Bergson explique que celles-ci « se donnent la main par-dessus les siècles », composant par là « une cité divine où elles nous invitent à entrer[28]. » Comment comprendre cette « cité divine » ? S’agit-il d’une communauté extérieure à l’histoire, la surplombant dans une éternité impassible ? On peut proposer une autre interprétation. L’un des moyens techniques utilisés pour la mise en évidence des propriétés miroirs de certains neurones est la tomographie (reproduction d’un objet en 3D) du cerveau par émission de positons (procédé appelé « TEP scan » pour : « tomographie par émission de positons »), ce qui permet d’enregistrer sur écran l’activité cérébrale par l’allumage phosphorescent des neurones en action. Que le TEP scan enregistre le cerveau de quelqu’un qui tend la main pour saisir un objet, et aussitôt la région corticale correspondant à l’action menée s’allumera sur l’écran. Que l’on enregistre de la même façon l’activité cérébrale de celui qui observerait cette action, et c’est la même zone de son cerveau qui s’allumera, à l’identique. On peut alors se prendre à imaginer que la « cité divine » dont parle Bergson ressemblerait assez au TEP scan à grande échelle de la société idéale rassemblant les grandes personnalités morales et leurs continuateurs, étonnant spectacle comparable à celui d’une ville la nuit, vue de haut… C’est donc sur un même plan que cette société idéale prendrait corps, ce qui rejoindrait du reste les passages nombreux où il apparaît, dans Les Deux Sources, qu’en agissant ou en réagissant moralement (par exemple dans l’indignation face à l’injustice), nous sommes les contemporains de ceux qui nous ont ouvert la voie (les prophètes d’Israël dans le cas de l’injustice[29]), et que leur création maintient donc perpétuellement dans l’être.

Mais peut-on enrôler aussi vite les neurones miroirs dans la perspective métaphysique qui est celle de Bergson ? La catégorie d’actions impliquées par le fonctionnement miroir du cerveau n’est peut-être pas celle qui est visée par Bergson à travers la morale ouverte. À proprement parler, les grands hommes de bien ne nous poussent pas à des actes déterminés. Ils nous invitent bien plutôt à adopter une certaine attitude. Ainsi en est-il des paroles du Christ, selon Bergson, que nous aurions tort justement de vouloir appliquer et traduire de manière motrice, car aussitôt ces paroles nous sembleraient « paradoxales » ou « contradictoires », c’est-à-dire « impraticables » :

Si celui qui a reçu un soufflet tend l’autre joue, que devient la justice, sans laquelle il n’y a pourtant pas de charité ? Mais le paradoxe tombe, la contradiction s’évanouit, si l’on considère l’intention de ces maximes, qui est d’induire un état d’âme. Ce n’est pas pour les pauvres, c’est pour lui que le riche doit faire abandon de sa richesse : heureux le pauvre « en esprit » ! Ce qui est beau, ce n’est pas d’être privé, ni même de se priver, c’est de ne pas sentir la privation[30].

Si la théorie des neurones miroirs garde donc une pertinence dans la perspective de Bergson, c’est dès lors uniquement sur le versant de la morale close, qui concerne les comportements habituels élémentaires, ceux de la vie quotidienne, destinés à la conservation de l’ordre social, dont la rupture, Bergson l’a montré dans son célèbre ouvrage, est sanctionnée par « le rire ». En d’autres termes, les propriétés miroirs du cerveau ne jouent que dans l’action d’imiter ce qui est imitable ou répétable, tandis que l’appel des grands hommes nous demande d’imiter ce qui est singulier, inimitable justement.

C’est peut-être que le problème de la causalité de l’exemple ne doit pas être posé en termes d’imitation. Une distinction proposée par Kant, dans la Critique de la Faculté de Juger, pourrait nous fournir ici une indication utile :

Suivre – ce qui fait référence à un prédécesseur – et non pas imiter : telle est l’expression juste pour désigner toute influence que les produits d’un créateur exemplaire peuvent avoir sur d’autres[31].

Dans ce passage, il ne s’agit en fait pas tant de renoncer ou de récuser l’imitation, que de distinguer deux modalités d’imitation : une imitation qui consisterait à « suivre », plutôt qu’à « reproduire » ou « répéter ». Quelle est la différence ? Les véritables créateurs sont ceux qui invitent à la création, et non ceux qui incitent à la « singerie ». Tel est le propre du « génie » selon Kant, dans le domaine de l’art : susciter d’autres créateurs, d’autres génies, éveiller chacun « au sentiment de sa propre originalité[32]. » Mais tout se passe comme si Bergson transposait cette doctrine kantienne du génie, dans le domaine pratique, et, de fait, selon lui, « la volonté aussi a son génie[33]. » Voilà ce que signifierait « entraîner » à sa suite dans le cas des grands hommes de bien : créer des créateurs, et par là s’éclairerait l’expression, au premier abord paradoxale, de « continuateurs originaux[34] » qu’on rencontre dans Les Deux Sources. Pourtant, si la causalité de l’exemple se trouve ainsi précisée, il s’en faut de beaucoup qu’elle soit expliquée. Car comment se fait-il que nous suivions effectivement ces hommes ? Comment se fait-il que nous ne suivions pas tous les hommes ?

De l’imitation à l’émotion : Bergson et la propagation du mysticisme

Si les grandes personnalités morales tendent à nous entraîner à leur suite, si elles obtiennent notre adhésion et suscitent en nous le désir de leur ressembler, c’est finalement, selon Bergson, en vertu d’une émotion[35]. Tel est l’élément dynamique ultime qui est l’élément spécifique de la morale ouverte, comme l’habitude est la force spécifique de la morale close. Mais ici encore, notre question revient : en abordant la morale ouverte en termes d’émotion, Bergson s’éloigne-t-il de tout modèle rationnel ? La question est d’autant plus légitime que l’émotion propre à cette morale n’est pas, précise lui-même Bergson, celle étudiée par la psychologie : elle est « supra-intellectuelle[36]. »

Si l’émotion marque un pas décisif dans les analyses de Bergson, ainsi qu’une prise de distance avec Tarde, c’est tout d’abord dans la mesure où elle constitue le principe explicatif de l’imitation. Il n’est pas suffisant de constater que nous imitons les grands hommes, encore faut-il comprendre pourquoi nous les imitons. Sur ce premier point, Bergson se démarquerait donc de Tarde pour qui, on l’a vu, l’imitation est une véritable loi du réel et un principe.

Mais il est une autre différence entre les deux penseurs, profonde, qui pourrait être masquée par une convergence flagrante entre eux : la nature également communicative de l’imitation et de l’émotion. L’une comme l’autre sont des phénomènes trans-subjectifs ou trans-individuels, dont il faut élucider le mode de diffusion. Bergson le dit en ces termes : l’émotion est « communicative[37]. » Or, c’est sur cette modalité de communication que Bergson et Tarde se séparent : pour Bergson et contrairement à ce qui se passe pour l’imitation chez Tarde, l’émotion se diffuse par propagation. Tarde précise en effet que « l’imitation est une génération à distance[38]. » Ce point décisif est explicité à l’aide d’un exemple, ou plutôt à travers la confrontation de trois cas, emprunté chacun à une forme de la « répétition universelle » qui est à l’œuvre dans les trois domaines qui constituent la réalité : un ouragan, une épidémie, une insurrection, avec à chaque fois un mode de diffusion spécifique. Tarde écrit ainsi :

Un ouragan se propage de proche en proche, et jamais on ne voit une onde se détacher pour aller porter au loin, omissio medio, le virus de la tempête. L’épidémie sévit autrement, elle frappe à droite et à gauche, épargnant telle maison, ou telle ville entre plusieurs autres, très éloignées qu’elle atteint presque à la fois. Plus librement encore se répand l’insurrection de capitale en capitale, d’usine en usine, à partir d’une nouvelle annoncée par le télégraphe. Parfois même la contagion vient du passé, d’une époque morte[39].

Le propre du mode de diffusion de l’imitation est donc d’ignorer les intermédiaires et les transitions[40], en ce sens que la copie n’est pas une extension du modèle, le prolongement d’un même mouvement. L’imitation se diffuse par une série d’initiatives reproductrices qui supposent une marge d’invention, ou de réinvention, du modèle. Certes, chez Bergson également, on l’a souligné plus haut, il y a place pour l’expression de la singularité, et en aucun cas ce n’est un flux impersonnel qui cherche à s’imposer. Ainsi, à propos de cet élan d’amour que les mystiques tente de propager dans le monde, Bergson note-t-il qu’à cet amour « chacun d’eux imprime la marque de sa personnalité ». Il reste cependant que celui-ci maintient le contact et la contiguïté, et par conséquent la causalité « de proche en proche », comme l’atteste l’image récurrente de l’incendie, qui correspondrait chez Tarde à la situation de l’ouragan commandée par l’ondulation physique :

L’émotion créatrice qui soulevait ces âmes privilégiées, et qui était un débordement de vitalité, s’est répandue autour d’elles : enthousiastes, elle rayonnait un enthousiasme qui ne s’est jamais complètement éteint et qui peut toujours retrouver sa flamme[41].

Toujours à propos de l’enthousiasme, Bergson explique en amont de ce passage, qu’il se répand d’âme en âme, « comme un incendie ». Ainsi, la causalité de l’exemple, ou du modèle, n’est-elle pas, aux yeux de Bergson, et contrairement à Tarde, une causalité à distance, mais une causalité de « proche en proche », procédant par raccordement et amplification, selon un modèle très précis, que l’on pourrait expliciter à partir d’un rapprochement avec certaines analyses de Gilbert Simondon que l’on trouve dans les toutes dernières pages de L’individuation à la lumière des notions de formes et d’information, où Simondon explique que le propre de l’agir moral est de « pouvoir se prolonger au-delà de lui-même[42] », selon ce qu’il considère comme une capacité de « rayonnement », d’« étalement » : « L’acte moral est celui qui peut s’étaler, se déphaser en actes latéraux, se raccorder à d’autres actes en s’étalant à partir de son centre actif unique[43]. » Cette capacité est nommée, à travers une référence explicite à Descartes, « générosité ». Impossible dès lors de ne pas songer à ce passage de Bergson, dans « La conscience et la vie » :

Mais créateurs par excellence est celui dont l’action, intense elle-même, est capable d’intensifier aussi l’action des autres hommes, et d’allumer généreuse des foyers de générosité[44].

Cette capacité de rencontrer d’autres actes, à l’infini, qui caractérise les grandes personnalités morales, Simondon l’appelle, en note, sur cette même page, « pouvoir d’amplification ». Par là, il explicite le modèle qui sous-tend l’explication de ce processus, celui des théories de la communication et de l’information. De fait, dans une conférence qu’il donne en 1962 sur « L’amplification dans les processus d’information[45] », Simondon prend l’incendie comme exemple : « La propagation d’un incendie de forêt à partir d’un foyer est un transfert multiplicatif selon le modèle de la surface[46]. » Ce rapprochement avec Simondon prend dès lors toute sa force et son importance, si l’on s’avise que celui-ci évoque dans les mêmes pages Les Deux Sources de la morale et de la religion à travers la distinction du clos et de l’ouvert (non sans un contresens d’ailleurs).

Toutefois, à côté de ce premier modèle explicatif de la propagation du mysticisme dans l’humanité, il en est un second, c’est celui, biologique, de l’organisation. C’est ce qui apparaît dans le troisième chapitre des Deux Sources, dans une section consacrée justement à la manière dont le mystique pourra transformer l’humanité. Bergson écrit ainsi : « Si le mysticisme doit transformer l’humanité, ce ne pourra être qu’en transmettant de proche en proche, lentement, une partie de lui-même[47]. » De quelle manière ? Bergson évoque « deux méthodes très différentes ». La première consisterait en une alliance de la mystique avec la mécanique, autrement dit avec le développement technique, censé libérer les hommes du besoin afin de les rendre disponible à l’appel des grands hommes de bien. Mais cette voie risquée (comment s’assurer que l’instrument ne s’éloigne pas de sa finalité légitime et ne vise, au-delà du nécessaire, le luxe ?) ne pouvait être que tardive, suspendue à la maturation de l’esprit d’invention. Le plus urgent consistait en tout autre chose :

C’était de ne pas rêver pour l’élan mystique une propagation générale immédiate, évidemment impossible, mais de le communiquer, encore que déjà affaibli, à un petit nombre de privilégiés qui formeraient ensemble une société spirituelle ; les sociétés de ce genre pourraient essaimer ; chacune d’elles, par ceux de ses membres qui seraient exceptionnellement doués, donnerait naissance à une ou plusieurs autres ; ainsi se conserverait, ainsi se continuerait l’élan jusqu’au jour où un changement profond des conditions matérielles imposées à l’humanité par la nature permettrait, du côté spirituel, une transformation radicale[48].

Quel est le sens de cet « essaimage » de « sociétés spirituelles » ? Il s’agissait pour les grands mystiques de fonder des « ordres » et des « couvents », selon un écart remarquable entre leur énergie surabondante, capable de « déplacer les montagnes », et la modestie du but. Or, tel est précisément la stratégie de la vie, dégagée à la fin du premier chapitre de L’Évolution créatrice, en un passage décisif qui donne selon nous tout son sens à celui-ci. Bergson y distingue deux types d’activité, la « fabrication » et l’« organisation ». « Fabriquer » consiste, selon lui, à disposer des parties de matière « autour de l’action », afin de les articuler entre elles et de les mobiliser dans une action commune, en refluant de la périphérie de l’action vers son centre idéal. Au contraire,

[…] le travail d’organisation va du centre à la périphérie. Il commence en un point qui est presque un point mathématique, et se propage autour de ce point par ondes concentriques qui vont toujours s’élargissant. […] l’acte d’organisation a quelque chose d’explosif : il lui faut au départ le moins de place possible, un minimum de matière[49]

Pour illustrer ce point, Bergson donne l’exemple du spermatozoïde « qui met en mouvement le processus évolutif de la vie embryonnaire », et qui est pourtant « une des plus petites cellules de l’organisme[50]. » La communication du mysticisme qui préside à la transformation de l’humanité est pensée par Bergson, on le voit, à travers un modèle précis qui emprunte à la biologie, et plus précisément à l’embryologie. Mais peut-on ici véritablement parler de « modèle » ? Pourtant que la modélisation suppose une activité de construction et de médiation, n’est-ce pas s’éloigner de l’intuition à laquelle Bergson en appelle dans toute son œuvre comme ce qui pourra seul nous donner quelque chose du réel ? D’autre part, n’est-ce pas trop accorder à la biologie que de lui confier le soin de nous dire ce qu’il en est du processus de diffusion du mysticisme ? Il faudrait plutôt parler de « lignes de faits » convergentes. L’histoire des religions et l’embryologie témoignent ici de l’existence d’un processus d’amplification analogue. Ce travail de comparaison, rapprochement et recoupement est d’ailleurs plus que jamais nécessaire et opératoire dans le dernier livre de Bergson, où il s’agit justement d’approcher au plus près une intuition, celle des grands mystiques, qui n’est pas directement accessible au philosophe. Mais ce rapprochement est-il légitime ? N’y a-t-il pas là un usage simplement métaphorique de la biologie ? Bergson ne procède-t-il pas à l’extension abusive à l’histoire de ce qui est valable pour la vie ? Si Bergson échappe à ce reproche, c’est dans la mesure où l’opération de métaphorisation suppose un domaine de pertinence originaire, une conception hiérarchique du sens qui fonde un partage entre le propre et le figuré ou non-propre. Or, s’il n’y a pas ici transport ou déplacement d’une région à une autre, c’est parce que toute la thèse de Bergson est de considérer que nous ne quittons pas la vie, que les mystiques ne font que prolonger l’effort de la vie pour vaincre l’inertie, l’immobilité.

Le but de cette étude était donc de souligner la solidarité de la démarche philosophique de Bergson avec les sciences, à travers celui de ses livres où cette collaboration pourrait paraître à première vue la plus menacée, et alors même qu’il aborde les questions de la destination de l’humanité, de la morale et de la religion, qui plus est à travers le mysticisme. Mais au terme de ce parcours, un singulier effet de miroir se produit : comme l’agir moral, rencontré in fine, l’agir théorique qu’est la philosophie se caractérise finalement lui aussi par un pouvoir de connexion et de raccordement à la réalité et aux savoirs qui la prennent pour objet. Quand il atteint à son intensité maximale, dans ce que Bergson appelle « intuition », l’acte philosophique, loin de se replier sur lui-même, voit, grâce à la science, sa capacité d’étalement et d’éclairage se démultiplier. C’est sans doute ce que Gilles Deleuze, l’un des héritiers les plus illustres du bergsonisme au XXe siècle, veut dire quand il soutient qu’il n’y a de création dans la pensée qu’en vertu des rencontres, c’est-à-dire en vertu des intersections créatrices entre domaines. Et c’est ce que nous avons pu vérifier à travers une série de rencontres de Bergson : non seulement réelles, avec Gabriel Tarde, mais aussi virtuelles, avec Max Weber, ou encore simplement possibles, avec la théorie contemporaines des neurones miroirs, chacune étant à chaque fois comme un « coup de sonde » dans la réalité, selon une démarche que, toujours selon le même effet de miroir entre le domaine pratique et le domaine théorique, l’on pourrait qualifier d’ouverte.



[1] Voir R. Aron, La sociologie allemande contemporaine (Paris, PUF, 2007), qui paraît la première fois en 1936.

[2] Bergson lui a consacré deux textes importants en 1909, l’un prononcé lors du discours d’inauguration d’un monument à sa mémoire, l’autre qui constitue la préface à un recueil de textes choisis de Tarde ; voir Henri Bergson, Écrits philosophiques, Paris, Puf, coll. « Quadrige », 2011, p. 375-379.

[3] Gabriel Tarde, Philosophie de l’histoire et science sociale, Paris, Seuil/Les Empêcheurs de penser en rond, 2002, p. 180.

[4] DS, p. 30.

[5] Henri Bergson, Écrits philosophiques, op. cit., p. 376.

[6] Gabriel Tarde, Philosophie de l’histoire et science sociale, op. cit., p. 180.

[7] DS, p. 74.

[8] Ibid., nous soulignons.

[9] Émile Durkheim, Sociologie et philosophie, Paris, Puf, coll. « Quadrige », 1996, p. 135.

[10] George Canguilhem, « Le problème des régulations dans l’organisme et dans la société », in Écrits sur la médecine, Paris, Seuil, 2002, p. 123.

[11] Cette attention commune portée par Bergson et Tarde sur cette « causalité de l’exemple » ou « causalité exemplaire », a été remarquablement soulignée par Jean Milet dans Gabriel Tarde et la philosophie de l’histoire, Paris, Vrin, 1970, p. 194 et s.

[12] Henri Bergson, Écrits philosophiques, op. cit., p. 378 ; c’est Bergson qui souligne.

[13] Cette destitution de l’individu dans la sociologie de Tarde voir la très importante préface de Bruno Karsenti aux Lois de l’imitation, Paris, Kimé, 1993, p. XI et s.

[14] Gabriel Tarde, Les Lois de l’imitation, Paris, Les Empêcheurs de penser en rond/Editions du Seuil, 2001, p.46.

[15] Giacomo Rizzolatti et Corrado Sinigaglia, Les Neurones miroirs, Paris, Odile Jacob, 2011, p. 143 (ce sont les auteurs qui soulignent). Les auteurs de l’ouvrage ne citent pas Bergson, mais un autre philosophe majeur du XXe siècle grand lecteur de Bergson, Merleau-Ponty, à qui ils empruntent certaines analyses qui soulignent la dimension essentiellement motrice de notre expérience ; voir Les Neurones miroirs, op. cit., p. 62. Sur Merleau-Ponty et les neurones miroirs, voir Etienne Bimbenet, Après Merleau-Ponty. Etudes sur la fécondité d’une pensée, chap. IX : « Le philosophe et les neurones miroirs », Paris, Vrin, 2011, p. 2009 et s.

[16] DS, p. 226.

[17] DS, p. 103.

[18] Voir « L’âme et le corps », in L’Énergie spirituelle, Paris, Puf, Quadrige, 2009, p. 50.

[19] La force et la fécondité des travaux de Bergson autour de la question du cerveau ont été souvent soulignées. Voir par exemple Frédéric Worms, « Le paralogisme du parallélisme. Le Cerveau et la pensée de Bergson (1904) et sa portée philosophique », in Les Cahiers philosophiques, numéro spécial « La pensée et le cerveau », n°64, oct. 1995, p. 143-170, et l’étude de Denis Forest, Histoire des aphasies, Paris, Puf, 2005, en particulier le chapitre IV : « Le son et le sens : lire Bergson aujourd’hui », p. 189 et s. Les travaux de Bergson sur le cerveau permettent selon nous de rattacher Bergson, par-dessus les interprétations spiritualistes qui ont pu être proposées de sa pensée, à ce qu’on appelle aujourd’hui « philosophie de l’esprit ».

[20] Repris dans L’énergie spirituelle (1919).

[21] Voir Henri Bergson, « Le parallélisme psycho-physique et la métaphysique positive », in Écrits philosophiques, op. cit., p. 249.

[22] Voir Gilles Deleuze, Deux Régimes de Fous, Paris, Minuit, 2003, p. 314.

[23] DS, p. 36.

[24] Ibid.

[25] Ibid.

[26] Voir Henri Bergson, deuxième « Introduction » à La Pensée et le Mouvant, éd. cit., p 94.

[27] Henri Bergson, « La perception du changement », in La Pensée et le Mouvant, éd. cit., p. 130.

[28] DS, p. 67.

[29] Ibid., p. 96.

[30] Ibid., p. 57-58.

[31] Emmanuel Kant, Critique de la Faculté de Juger, §32, trad. Alain Renaut, Paris, GF, 2000, p. 267 ; c’est Kant qui souligne.

[32] Emmanuel Kant, ibid., p. 305.

[33] DS, p. 56.

[34] Ibid., p. 254.

[35] Pour une étude de l’émotion dans la philosophie de Bergson, nous nous permettons de renvoyer à notre article : « L’émotion dans la philosophie de Bergson : ‘‘la force qui transporte et qui soulève’’ », in Sylvain Roux (dir.), Les émotions, Paris, Vrin, coll. « Thema », 2009, p. 211-234.

[36] DS, p. 41.

[37] Ibid., p. 51.

[38] Les Lois de l’imitation, op. cit., p. 94.

[39] Id.

[40] Sur ce point, voir Bruno Karsenti, La société en personnes, Paris, Economica, 2006, chap. VIII : « L’imitation. Retour sur le débat entre Durkheim et Tarde », p. 180 et s.

[41] DS, p. 98-99.

[42] L’individuation à la lumière des notions de forme et d’information, Paris, Millon, 2005, p. 334.

[43] Ibid.

[44] Henri Bergson, « La conscience et la vie », in L’Énergie spirituelle, Paris, Puf, coll. Quadrige, 2009, p. 25.

[45] Gilbert Simondon, Communication et information. Cours et conférences, Chatou, La Transparence, 2010, p. 159 et s.

[46] Ibid., p. 162.

[47] DS, p. 249.

[48] DS, p. 250.

[49] L’Évolution créatrice, éd. cit., p. 93.

[50] Ibid.

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